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Page:Créquy - Souvenirs, tome 4.djvu/9

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Danemarck avait fait dans la matinée, ce qui mettait toute la suite de S. M. Danoise, et surtout le Duc de Duras, frère de Mme de Mazarin, dans un embarras mortel.

On n’oubliera jamais une certaine fête qu’elle avait donnée pour Madame, Comtesse de Provence, et Mme la Comtesse d’Artois, à l’occasion du mariage de ces deux Princesses. C’était une fête champêtre, et c’était dans son hôtel à Paris. Elle avait eu l’excellente idée d’y faire venir une quarantaine de danseuses de l’Opéra qu’elle avait fait ajuster en bergères et qui devaient danser derrière une immense glace dont on avait enlevé l’étain, et qu’on avait fait descendre jusqu’au niveau du parquet de la galerie pour qu’il n’en fût rien perdu. La grande salle où devaient figurer lesdites bergères était bien peinte en perspective d’un joli paysage et tout ombragée par de hauts citronniers et de grands orangers, dont on avait enfoncé les caisses au-dessous du parquet, lequel était couvert de mousse, avec de petits sentiers garnis de fleurs. En outre, Servandoni avait imaginé d’y mettre une cascade, et l’eau qu’on y voyait couler était mêlée de lait de beurre (précaution, nous disait-il indispensable quand on veut faire jouer des eaux à la clarté des bougies, attendu qu’on n’en verrait presque rien sans cela). Toujours est-il que Servandoni n’a jamais fait décoration plus naturelle et plus charmante, et toujours est-il que les préparatifs de cette fête avaient coûté 80,000 francs.

Mme de Mazarin, qui voulait ménager une agréable surprise à leurs Altesses Royales, avait fait arri-