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Page:Créquy - Souvenirs, tome 6.djvu/145

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Cardinaux et les Maréchaux. — Votre Éminence veut bien m’assurer qu’elle compte sur mon activité, lui disais-je ; mais elle ne s’est pas occupée de ma sincérité. Si je ne suis pas encore assez vieille pour mourir, je suis trop vieille pour courir, et surtout, Monseigneur, je suis trop équitable pour aller plaider une affaire où ma conscience ne me permettrait peut-être pas de témoigner favorablement du côté le plus naturel et suivant l’attrait de mon cœur…

Votre père en conçut une irritation fort injuste. C’est à partir de là que sa tendresse a diminué pour moi ; j’en ai gémi sans en éprouver de repentir. J’avais agi suivant la justice et selon ma conscience ; je vous aime tendrement, et vous n’en sauriez douter ; mais je ne me conduirais pas autrement envers vous dans un cas pareil. Que voulait-on que je fusse dire à Versailles, à moins d’y solliciter indulgence, en compromettant la prudence ou la véracité de mon fils ? Je ne sais rien dire en faveur des gens qui n’ont pas raison, et les liens du sang ou de l’amitié n’y font rien du tout, sinon d’augmenter mon embarras et de fortifier mes scrupules, de manière à les rendre insurmontables.

On a dit aussi qu’ayant parlé de la Maison de Lorraine avec trop de hauteur et d’inconsidération, votre père avait reçu de l’Archiduc Léopold un avis qui l’aurait empêcher de séjourner à Florence, et qu’il aurait traversé l’État de Toscane, accompagné par deux gardes forestiers de ce Grand-Duc. Il n’y a pas dans cet épisode une seule parole de vérité. Il demeura pendant trois mois à Florence ; mais