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LES ORIGINES

dit. Les groupes d’Asie deviennent plus asiatiques, sous les noms de Dardaniens, de Lyciens, de Cariens, de Léléges. Au contraire, ceux des îles et d’une partie de la Grèce propre, surtout sur le rivage oriental, laissent apercevoir déjà une physionomie ionienne ; ils sont à demi tournés vers l’Orient, mais ils s’en détachent, ils reçoivent du dehors et ils font prospérer chez eux des éléments précieux de civilisation. Parmi eux, se constituent bientôt, sur certains points au moins, des sociétés guerrières, des royautés fortes et entreprenantes ; ce sont, en Phthiotide et dans le Péloponnèse, les dynasties achéennes ; en Crète, la puissance de Minos ; en Béotie, les principautés minyennes. Il y a là environ trois ou quatre siècles de vie héroïque, de grandes entreprises, de guerres, et aussi de développement intellectuel, religieux, économique et social. C’est pendant ces siècles que s’amasse la matière de la poésie future ; c’est l’âge des Argonautes, celui des guerres de Thèbes, de Troie, d’Héraclès, de Thésée, des Pélopides et des Labdacides. Grands événements et grands noms idéalisés, que nous ne connaissons plus que par des légendes, mais au travers desquels nous entrevoyons pourtant une réalité orageuse et féconde.

Vers le xiie siècle, des mouvements importants se produisent parmi les tribus préhelléniques, et alors commence la période d’hellénisation ; elle se prolonge jusqu’au milieu du viiie siècle environ, où s’ouvre l’ère des Olympiades. C’est dans cette période que l’unité hellénique se constitue, sans effacer d’ailleurs les distinctions originelles : les Grecs deviennent vraiment un peuple. L’établissement des Doriens dans le Péloponnèse donne lieu à la formation d’un certain nombre d’États réguliers, pourvus d’une discipline sociale et d’une puissance durable. Par contre-coup, les tribus voisines s’organisent plus fortement. L’Attique en particulier devient alors, elle aussi, un État, et son caractère ionien s’accuse, par opposition au caractère dorien de Sparte. Beaucoup des anciens habitants de la Grèce propre, chassés