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Page:Croiset - Manuel d’histoire de la littérature grecque, 10e éd.djvu/16

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HISTOIRE DE LA LITTÉRATURE GRECQUE

de chez eux par suite des invasions, vont s’établir sur le rivage d’Asie, où se trouvaient depuis longtemps des populations de même origine. Ils y créent en quelque sorte une Grèce nouvelle, particulièrement active et entreprenante. Au milieu de ces mouvements divers, les affinités primitives prennent plus d’importance, puisqu’elles déterminent les courants d’émigration et les alliances. Les Doriens d’une part, les Ioniens de l’autre, apparaissent désormais comme deux groupes rivaux, nettement caractérisés : les premiers plus attachés à la tradition, plus disciplinés, plus austères, et plus enfermés en eux-mêmes ; les seconds, plus mobiles, plus enclins à la liberté et aux innovations, plus ouverts aux influences du dehors. Quant aux autres tribus, qui ne se rattachent ni aux Doriens ni aux Ioniens, l’usage les a groupés sous le nom d’Éoliens ; groupement factice qui rapproche des éléments différents, mais qui oppose le vieux fonds primitif aux deux unités ethniques nouvellement prédominantes. Au reste, Doriens, Ioniens, Éoliens, tous, en face des « Barbares » qu’ils rencontrent dans l’essor de la colonisation, prennent une conscience de plus en plus nette de leur fraternité d’origine. Le nom d’Hellènes, né dans la Grèce du Nord, puis répandu probablement dans la Grèce centrale par l’amphictyonie delphique, s’élargit alors rapidement. En raison de son caractère antique et religieux, il s’élève vite au-dessus des dénominations particulières qui divisent les tribus et les États. De proche en proche, il est accepté ou revendiqué par tous. Il atteste l’unité nationale et il la fortifie. Celle-ci est d’ailleurs consolidée par l’institution des grandes fêtes panhelléniques et par leur rapide développement. Le commencement des Olympiades marque le moment où l’ « hellénisme » entre dans l’histoire.

Le peuple qui s’était ainsi formé fut peut-être le mieux doué pour les arts qui ait jamais existé. La curiosité, la vivacité des impressions, la promptitude de l’intelligence, le goût du raisonnement étaient associés en lui à la force créatrice