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LES ORIGINES

on arrive, par l’étude des faits connus, à des conclusions très voisines à ces traditions.

3. Indices historiques de l’existence d’une poésie primitive. — L’archéologie a pu constater, par l’étude des monuments, qu’il y avait eu une floraison des arts plastiques en Grèce dès la période préhellénique. On a trouvé à Orchomène, à Tirynthe, à Mycènes, et sur divers autres points, en Attique, en Laconie, dans les îles, en Crète principalement, des restes d’enceintes fortifiées, des palais, des sépultures, avec quantité d’objets en or, en cuivre, en pierres ciselées, en verre de couleur, ou en terre cuite, qui permettent d’imaginer à peu près la vie des princes de ce temps. On voit qu’ils aimaient le luxe, et que ce luxe n’était pas un faste grossier, mais qu’il était empreint déjà du sens de l’art. Ces princes étaient guerriers et chasseurs. Lorsqu’ils célébraient les cérémonies de leur culte ou qu’ils rassemblaient leurs compagnons dans les grandes salles de leurs palais, toutes brillantes de peintures et de revêtements métalliques, n’avaient-ils pas déjà des poètes pour chanter les légendes de leurs dieux et pour glorifier leurs ancêtres ?

Les poèmes de l’âge homérique ont pour fondement tout un cycle de mythes et de récits héroïques, qui ont dû être élaborés peu à peu. Les plus anciens de ces poèmes nous montrent qu’au temps où ils naquirent, ce cycle était fort développé. Les relations généalogiques des dieux et leurs attributs essentiels constituaient déjà une ample série de traditions. Et ces traditions n’appartenaient pas à la région où naissaient alors ces poèmes, c’est-à-dire à la Grèce d’Asie ; beaucoup d’entre elles se rapportaient à des lieux déterminés de la Grèce continentale ; raison sérieuse de croire qu’elles venaient de là et qu’elles y avaient grandi. C’étaient dans les chants simples qui accompagnaient les sacrifices qu’elles avaient dû recevoir leur première forme. Ce qui est vrai des dieux l’est aussi des héros. L’épopée