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HISTOIRE DE LA LITTÉRATURE GRECQUE

divers genres de chants rustiques, qui se mêlaient aux travaux de la campagne. Les paroles de ces chants ne pouvaient être que fort simples ; car l’âme humaine était bien loin encore de savoir analyser ses sentiments ; quelques mots répétés lui suffisaient pour se soulager de ses émotions. Les airs eux-mêmes n’étaient peut-être pas tous nés sur le sol grec ; quelques-uns pouvaient être venus du dehors ; ils avaient plu, et ils s’étaient transmis de proche en proche. Airs et chants constituaient ensemble une forme élémentaire de poésie qui avait son caractère propre. Elle n’était pas narrative comme celle dont il a été question précédemment ; elle exprimait directement les sentiments actuels de ceux qui en faisaient usage. Et ces sentiments étaient collectifs, c’est-à-dire communs à un groupe déterminé, parents, amis, frères d’armes ou compagnons de travail. Il y avait donc là vraiment le germe du futur lyrisme choral.

Ainsi, dès les temps antérieurs à l’histoire, nous entrevoyons en Grèce, sous forme d’hymnes, de récits héroïques, de chants variés, toute une végétation première de poésie qui commençait à sortir de terre. Ces pousses, jeunes et vigoureuses, allaient grandir rapidement, et, en grandissant, développer chacune ses caractères propres. La première qui fleurit avec éclat fut l’épopée. Voyons comment se produisit cette floraison.