Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/22

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pas invraisemblable que le même principe s’étende à la faculté de rêver davantage dans le sens d’avoir des rêves plus animés et plus variés ; mais de nombreux passages de mon journal, écrits à une époque où j’étais loin d’avoir encore aucune opinion arrêtée, me prouvent que c’était surtout la facilité à me rappeler mes rêves qui, sous l’influence de l’habitude, allait augmentant de jour en jour, ou, pour mieux dire, de nuit en nuit. En recherchant les souvenirs de la dernière nuit écoulée, il m’arrivait parfois de retrouver tout à coup la chaîne et les incidents d’un rêve antérieur précédemment oublié. Je constatais alors que la mémoire seule m’avait fait défaut, quand j’avais cru pouvoir accuser une interruption dans mes songes. Cette opinion, qui, chez moi, devait devenir plus tard une conviction profonde, à savoir que la pensée ne s’éteint jamais d’une manière absolue, non plus que le sang ne cesse jamais absolument de circuler, j’en avais déjà le germe intuitif, en écrivant des phrases telles que celles-ci :

« 14 juin. ― Cette nuit, je n’ai rien rêvé, ou plutôt je ne me souviens de rien ; car il me paraît impossible que j’aie passé une nuit sans rêves.

« 28 juin. ― Rien, absolument rien ; j’ai beau me creuser la tête, je ne puis me rappeler ce que j’ai rêvé cette nuit.