Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/344

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Cette incohérence dans les idées, ce singulier oubli de la rime, il ne s’en était pas même aperçu avant de s’éveiller. Des images séduisantes par leur éclat, par leur grâce, par leur étrangeté féerique captivaient trop vivement son attention pour qu’il pût la fixer ailleurs. Il croyait poursuivre une forme enchanteresse à travers un jardin magique. Il croyait lui-même avoir des ailes. Son cœur débordait de sensations délicieuses : l’ivresse morale était à son comble. Ses vers suivaient le désordre de ses pensées ; les mots qu’il employait le charmaient parce que n’ayant ni le temps, ni la liberté d’en peser la valeur intrinsèque, il confondait dans le même enthousiasme et ce qu’il avait voulu rendre, et ce qu’il avait réellement rendu.

Telle est du moins la façon dont je m’explique ce genre d’illusions très fréquent dans nos rêves que plus de vingt observations personnelles m’ont permis d’analyser.

S’agit-il de concevoir la composition d’un tableau, d’écouter pour ainsi dire intérieurement une inspiration musicale, de suivre en ligne droite une série de déductions mathématiques, de procéder par voie d’intuition, ou de progression simple ? Le travail exécuté en rêve sera quelquefois supérieur à celui-là même qu’on aurait accompli étant éveillé. Mais s’il s’agit d’ouvrages