Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/353

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dont la dernière strophe me donnerait la clef. Toutefois, je sentais aussi que j’oubliais ces révélations à mesure qu’elles m’étaient faites, et j’en ressentais un vif chagrin. Oh ! si je pouvais me les rappeler ! me disais-je ; et comme je reconstruisais péniblement quelques vers, un être, dont je ne distinguais qu’imparfaitement la nature et la figure, mais qui pourtant me semblait humain, se mit à me répéter mot pour mot tout ce que je venais de dire moi-même, sans hésitation, sans lacune, de telle sorte que j’en reconnaissais les moindres mots. Malheureusement, quelques efforts que je pusse faire, tout rentrait pour ma mémoire dans une nuit profonde aussitôt qu’il avait parlé. Cela me causait un grand tourment. La supériorité de cet être inexpliqué m’inspirait une sorte d’écrasement moral. « Qui êtes-vous donc, lui demandai-je enfin, vous qui vous souvenez mieux que moi de ce que j’ai improvisé moi-même ; vous qui me laissez entendre que si je possédais comme vous la mémoire et l’arrière-mot de tout ceci, j’aurais déjà saisi ce secret surnaturel dont je n’ai qu’une vague intuition ? » Il me prit alors les deux mains et me regarda jusqu’au fond de ma pensée la plus intime avec des yeux de feu qui me pénétraient d’une véritable terreur. Tandis que son corps se perdait dans une ombre indécise, sa tête était lumineuse et de proportion colossale, et,