Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/388

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Sous l’empire d’un violent coryza, le fumeur trouve à tous les tabacs une odeur, je dirais presque une saveur identique. La partie délicate de l’arôme, principe distinctif des diverses espèces de tabac, est impuissante à se faire sentir. Une sorte de décomposition s’opère, et dégagée des éléments complexes dont l’ensemble formait pour chaque tabac son parfum spécial, l’énergique vertu de la nicotine parvient seule à impressionner les papilles engourdies du nez et du palais. S’est-il donc produit quelque chose d’analogue ? Je signale cette question ; je ne la juge pas.

Je laissai quelque temps reposer mes odeurs, et puis l’idée me vint d’expérimenter encore si le mélange de deux d’entre elles amènerait le mélange de deux souvenirs. Quelques gouttes de celle qui me rappelait le Vivarais furent, d’après mes instructions et pendant mon sommeil, répandues sur mon oreiller. On y versa en même temps quelques gouttes d’une autre essence, dont j’avais fait souvent imprégner mon mouchoir à une époque où je travaillais dans l’atelier de peinture de M. D... Cet essai, trois fois répété, donna les résultats que voici : la première fois, je rêvai que j’étais dans un pays de montagnes, suivant des yeux le travail d’un artiste qui jetait sur la toile un point de vue des plus pittoresques. Évidemment, il y avait mariage entre les réminiscences