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ÉLÉMENTS DE PHYSIOLOGIE.

Le passage de la veille au sommeil est toujours un petit délire.

Les organes, diversement fatigués, sont comme des voyageurs qui se séparent, l’un marche encore, tandis que l’autre, harassé, discontinue sa route.

De là cette succession d’images, de sons, de goûts, de sensations, décousue à l’origine du faisceau ou au sensorium commune.

Les fonctions animales ou intellectuelles suspendues pendant le sommeil ; les vitales, non.

Au sortir d’un profond sommeil ou d’une forte méditation, on ne sait ce qu’on est. C’est le ressouvenir des choses passées qui nous rend à nous.

La conscience du soi et la conscience de son existence sont différentes.

Des sensations continues sans mémoire donneraient la conscience interrompue de son existence ; elles ne produiraient nulle conscience du soi.

Il y a bien de l’affinité entre le rêve, le délire et la folie. Celui qui persisterait dans l’un des deux premiers serait fou.

Délire raisonné et rêve suivi, c’est la même chose ; il n’y a de différence que dans la cause et dans la durée.

Somnambules. (Expliquer comment la chose se fait en eux.)

Le rêve décousu vient du mouvement tumultueux des brins ; l’un fait entendre un discours, l’autre excite un désir, un troisième surexcite une image. C’est la conversation de plusieurs personnes qui parlent à la fois de différents sujets ; cela ressemblerait encore davantage à ce jeu où l’un écrit un commencement de phrase qu’un autre continue, et ainsi successivement.

Le rêve des jeunes personnes dans l’état d’innocence vient de l’extrémité des brins qui portent à l’origine des désirs obscurs, des inquiétudes vagues, une mélancolie dont elles ignorent la cause ; elles ne savent ce qu’elles veulent, faute d’expérience, elles prennent cet état pour de l’inspiration, le goût de la solitude, de la retraite et de la vie monastique.

    le bout qui est dans le cerveau. Si ces petits filets sont remués dans le cerveau, l’âme aperçoit quelque chose au dehors. » On voit que ce n’est qu’une question de mot… et de harpeur.