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ÉLÉMENTS DE PHYSIOLOGIE.

troduisent dans l’âme sans mouvements corporels ; je le défie, et sans commencer par ces mouvements.

Sottise de ceux qui descendent de l’âme au corps. Il ne se fait rien ainsi dans l’homme.

Marat[1] ne sait ce qu’il dit quand il parle de l’action de l’âme sur le corps. S’il y avait regardé de plus près, il aurait vu que l’action de l’âme sur le corps est l’action d’une portion du corps sur l’autre ; et l’action du corps sur l’âme, l’action d’une autre portion du corps sur une autre.

Autant il est clair, ferme, précis dans son chapitre de l’action du corps sur l’âme, autant il est vague, faible, dans le chapitre suivant.

Phénomènes de l’union de l’âme avec le corps sont constants dans tous les hommes. Comment cela se peut-il, si l’âme et le corps sont deux substances hétérogènes ?

Ame, selon Stahliens[2], substance immatérielle, cause de tous les mouvements du corps, qui n’est qu’une machine hydraulique, dépourvue de toute activité, nullement différente de toute autre machine faite de matière inanimée.

Fabrication même du corps et exercice de toutes ses fonctions, naturelles, vitales, ouvrage de l’âme, qui sait tout, mais qui n’est pas toujours attentive à tout, réparant dans le sommeil, capricieuse, fantasque, négligente, paresseuse, désespérée, craintive, capable par sa nature bien ou malfaisante d’allonger ou d’abréger la vie.

Ame, cause de mouvements volontaires, dont elle a la conscience, de mouvements involontaires sans en être consciente. Action de l’âme forcée, action raisonnée. Mais mouvement après la mort, d’où vient-il ?

En vain dirait-on que l’âme a un commerce fort étroit avec le corps ; cela ne fait qu’augmenter notre surprise et les difficultés.

Ce commerce est tel qu’à l’occasion des désirs de l’âme, il est dit qu’il s’excitera des mouvements dans le corps, et qu’à l’occasion des mouvements du corps, il s’excitera des désirs

  1. Dans son livre : De l’homme, ou des principes et des lois de V influence de l’âme sur le corps et du corps sur l’âme. Amsterdam, 1773, 3 vol. in-12.
  2. Stahl (1660-1734) est le fondateur de la doctrine connue sous le nom d’animisme que Diderot expose dans les lignes qui suivent.