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le ministere de M. Colbert qu’elles avoient fait à Rome sous celui de Mécénas.

Ministere est aussi quelquefois un nom collectif, dont on se sert pour signifier les ministres d’état. Ainsi nous disons, le ministere qui étoit Wigh devint Tory dans les dernieres années de la reine Anne, pour dire que les ministres attachés à la premiere de ces factions furent remplacés par d’autres du parti contraire.

Ministere public, (Jurisprud.) ce terme pris dans une étroite signification, veut dire service ou emploi public, fonction publique.

Mais on entend plus ordinairement par ce terme, ceux qui remplissent la fonction de partie publique ; savoir, dans les cours supérieures, les avocats & procureurs généraux ; dans les autres jurisdictions royales, les avocats & procureurs du roi ; dans les justices seigneuriales, le procureur fiscal ; dans les officialités, le promoteur.

Le ministere public requiert tout ce qui est nécessaire pour l’intérêt du public ; il poursuit la vengeance des crimes publics, requiert ce qui est nécessaire pour la police & le bon ordre, & donne des conclusions dans toutes les affaires qui intéressent le roi ou l’état, l’église, les hôpitaux, les communautés : dans quelques tribunaux, il est aussi d’usage de lui communiquer les causes des mineurs. On ne le condamne jamais aux dépens, & on ne lui adjuge pas non plus de dépens contre les parties qui succombent. Voyez Avocat général, Avocat du roi, Conclusions, Communication au parquet, Gens du roi, Procureur général, Procureur du roi, Substituts, Requête civile. (A)

MINISTRE, (Gramm. Hist. mod.) celui qui sert Dieu, le public, ou un particulier. Voyez Serviteur.

C’est en particulier le nom que les Prétendus Réformés donnent à ceux qui tiennent parmi eux la place de prêtres.

Les Catholiques mêmes appellent aussi quelquefois les évêques ou les prêtres, les ministres de Dieu, les ministres de la parole ou de l’Evangile. On les appelle aussi pasteurs. Voyez Evêque, Prêtre, &c.

Ministres de l’autel, sont les ecclésiastiques qui servent le célébrant à la messe ; tels sont singulierement le diacre & le sous-diacre, comme le porte leur nom ; car le mot grec διάκονος signifie à la lettre, ministre. Voyez Diacre & Sous-diacre.

Ministre, (Hist. eccl.) est aussi se titre que certains religieux donnent à quelques uns de leurs supérieurs. Voyez Supérieur.

On dit dans ce sens le ministre des Mathurins, le ministre de la Merci. Parmi les Jésuites, le ministre est le second supérieur de chaque maison ; il est en effet le ministre ou l’aide du premier supérieur, qu’on nomme le recteur. C’est ce qu’on appelle dans d’autres communautés, assistant, sous-prieur, vicaire. Le général des Cordeliers s’appelle aussi ministre général. Voyez Général.

Ministre d’état, (Droit public.) est une personne distinguée que le roi admet dans sa confiance pour l’administration des affaires de son état.

Les princes souverains ne pouvant vaquer par eux-mêmes à l’expédition de toutes les affaires de leur état, ont toujours eu des ministres dont ils ont pris les conseils, & sur lesquels ils se sont reposés de certains détails dans lesquels ils ne peuvent entrer.

Sous la premiere race de nos rois, les maires du palais, qui dans leur origine ne commandoient que dans le palais de nos rois, depuis la mort de Dagobert, accrurent considérablement leur puissance ; leur emploi, qui n’étoit d’abord que pour un tems, leur fut ensuite donné à vie ; ils le rendirent héréditaire, & devinrent les ministres de nos rois :

ils commandoient aussi les armées ; c’est pourquoi ils changerent dans la suite leurs qualités de maire en celle de dux Francorum, dux & princeps, subregulus.

Sous la seconde race, la dignité de maire ayant été supprimée, la fonction de ministre fut remplie par des personnes de divers états. Fulrard, grand chancelier, étoit en même tems ministre de Pepin. Eginhard, qui étoit, à ce que l’on dit, gendre de Charlemagne, étoit son ministre, & après lui Adelbard. Hilduin le fut sous Louis le débonnaire, & Robert le fort, duc & marquis de France, comte d’Anjou, bisaieul de Hugues-Capet, tige de nos rois de la troisieme race, faisoit les fonctions de ministre sous Charles le chauve.

Il y eut encore depuis d’autres personnes qui remplirent successivement la fonction de ministres, depuis le commencement du regne de Louis le begue, l’an 877 jusqu’à la fin de la seconde race, l’an 987.

Le chancelier qu’on appelloit, sous la premiere race, grand référendaire, & sous la seconde race, tantôt grand chancelier ou archi-chancelier, & quelquefois souverain chancelier ou archi-notaire, étoit toujours le ministre du roi pour l’administration de la justice, comme il l’est encore présentement.

Sous la troisieme race, le conseil d’état fut d’abord appellé le petit conseil ou l’étroit conseil, ensuite le conseil secret ou privé, & enfin le conseil d’état & privé.

L’étroit conseil étoit composé des cinq grands officiers de la couronne ; savoir, le sénéchal ou grand-maître, le connétable, le bouteiller, le chambrier & le chancelier, lesquels étoient proprement les ministres du roi. Ils signoient tous ses chartres ; il leur adjoignoit, quand il jugeoit à propos, quelques autres personnes distinguées, comme évêques, barons ou sénateurs : ce conseil étoit pour les affaires journalieres ou les plus pressantes.

Le sénéchal ou grand sénéchal de France, qui étoit le premier officier de la couronne, étoit aussi comme le premier ministre du roi ; il avoit la surintendance de sa maison, en régloit les dépenses, soit en tems de paix ou de guerre ; il avoit aussi la conduite des troupes, & cette dignité fut reconnue pour la premiere de la couronne sous Philippe I. Il étoit ordinairement grand-maître de la maison du roi, gouverneur de ses domaines & de ses finances, rendoit la justice aux sujets du roi, & étoit au dessus des autres sénéchaux, baillifs & autres juges.

L’office de grand sénéchal ayant cessé d’être rempli depuis 1191, les choses changerent alors de face ; le conseil du roi étoit composé en 1316, de six des princes du sang, des comtes de St. Paul & de Savoie, du dauphin de Vienne, des comtes de Boulogne & de Forêts, du sire de Mercour, du connétable, des sieurs de Noyers & de Sully, des sieurs d’Harcourt, de Reinel & de Trye, des deux maréchaux de France, du sieur d’Erquery, l’archevêque de Rouen, l’évêque de saint-Malo & le chancelier ; ce qui faisoit en tout vingt-quatre personnes.

En 1350 il étoit beaucoup moins nombreux, du moins suivant le registre C. de la chambre des comptes ; il n’étoit alors composé que de cinq personnes ; savoir, le chancelier, les sieurs de Trye & de Beaucou, Chevalier, Enguerrand du petit collier, & Bernard Fermant, trésorier ; chacun de ces conseillers d’état avoit 1000 livres de gages, & le roi ne faisoit rien que par leur avis.

Dans la suite le nombre de ceux qui avoient entrée au conseil varia beaucoup, il fut tantôt augmenté & tantôt diminué. Charles IX. en 1564, le réduisit à vingt personnes : nous n’entreprendrons pas de faire ici l’énumération de tous ceux qui ont rempli la fonction de ministres sous les différens re-