sique alambiquée. Pour tâcher d’en découvrir la vraie notion, on doit d’abord remarquer que les quantités qu’on appelle négatives, & qu’on regarde faussement comme au-dessous du zéro, sont très souvent représentées par des quantités réelles, comme dans la Géométrie, où les lignes négatives ne different des positives que par leur situation à l’égard de quelque ligne au point commun. Voyez Courbe. De-là il est assez naturel de conclure que les quantités négatives que l’on rencontre dans le calcul, sont en effet des quantités réelles ; mais des quantités réelles auxquelles il faut attacher une idée autre que celle qu’on avoit supposée. Imaginons, par exemple, qu’on cherche la valeur d’un nombre x, qui ajouté à 100 fasse 50, on aura par les regles de l’Algebre, , & ; ce qui fait voir que la quantité x est égale à 50, & qu’au lieu d’être ajoutée à 100, elle doit en être retranchée ; de sorte qu’on auroit dû énoncer le problème ainsi : trouver une quantité x qui étant retranchée de 100, il reste 50 ; en énonçant le problème ainsi, on auroit , & ; & la forme négative de x ne subsisteroit plus. Ainsi les quantités négatives indiquent réellement dans le calcul des quantités positives, mais qu’on a supposées dans une fausse position. Le signe − que l’on trouve avant une quantité sert à redresser & à corriger une erreur que l’on a faite dans l’hypothese, comme l’exemple ci-dessus le fait voir très-clairement. Voyez Equation.
Remarquez que nous ne parlons ici que des quantités négatives isolées, comme-a, ou des quantités , dans lesquelles b est plus grand que a ; car pour celles où est positif, c’est-à-dire où b est plus petit que a, le signe ne fait aucune difficulté.
Il n’y a donc point réellement & absolument de quantité négative isolée : −3 pris abstraitement ne présente à l’esprit aucune idée ; mais si je dis qu’un homme a donné à un autre −3 écus, cela veut dire en langage intelligible, qu’il lui a ôté 3 écus.
Voilà pourquoi le produit de −a par −b, donne + ab : car a & b étant précédés du signe − par la supposition, c’est une marque que ces quantités a, b, se trouvent mêlées & combinées avec d’autres à qui on les compare, puisque si elles étoient considérées comme seules & isolées, les signes-dont elles sont précédées, ne présenteroient rien de net à l’esprit. Donc ces quantités −a & −b ne se trouvent précédées du signe −, que parce qu’il y a quelque erreur tacite dans l’hypothese du problème ou de l’opération : si le problème étoit bien énoncé, ces quantités −a, −b, devroient se trouver chacune avec le signe +, & alors leur produit seroit + ab ; car que signifie la multiplication de −a par −b, c’est qu’on retranche b de fois la quantité négative −a : or par l’idée que nous avons donnée ci-dessus des quantités négatives, ajouter ou poser une quantité négative, c’est en retrancher une positive ; donc par la même raison en retrancher une négative, c’est en ajouter une positive ; & l’énonciation simple & naturelle du problème doit être, non de multiplier −a par −b, mais +a par +b ; ce qui donne le produit +ab. Il n’est pas possible dans un ouvrage de la nature de celui-ci, de développer davantage cette idée, mais elle est si simple, que je doute qu’on puisse lui en substituer une plus nette & plus exacte ; & je crois pouvoir assurer que si on l’applique à tous les problèmes que l’on peut résoudre, & qui renferment des quantités négatives, on ne la trouvera jamais en défaut. Quoi qu’il en soit, les regles des opérations algébriques sur les quantités négatives, sont admises par tout le monde, & reçues généralement comme exactes, quelque idée qu’on attache d’ailleurs à ces quantités sur les ordonnées négatives d’une courbe,
& leur situation par rapport aux ordonnées positives Voyez Courbe.
Nous ajouterons seulement à ce que nous avons dit dans cet article, que dans la solution d’un problème géométrique, les quantités négatives ne sont pas toujours d’un côté opposé aux positives ; mais d’un côté opposé à celui où l’on les a supposées dans le calcul. Je suppose par exemple, que l’on ait l’équation d’une courbe entre les rayons partant d’un centre ou pole, que j’appelle y, & les angles correspondans que je nomme z ; ensorte que y, par exemple, , il est évident que lorsque cos. z sera = −1, alors si a est > b, y sera dans une position directement contraire à celle qu’elle avoit lorsque cos. z = 1, cependant l’une & l’autre valeur de y seront sous une forme positive dans l’équation. Mais si a est < b, alors la valeur algébrique de y sera négative, & y devra être prise du même côté que quand cos. z = 1, c’est-à-dire du côté contraire à celui vers lequel on a supposé qu’elle devoit être prise. Il se présente encore d’autres cas en Géométrie, où les quantités négatives paroissent se trouver du côté où elles ne devroient pas être ; mais les principes que nous venons d’établir, & ceux que nous avons posés ou indiqués à l’article Equation, suffiront pour résoudre ces sortes de difficultés. Nous avons expliqué dans cet article en quoi les racines négatives des équations différoient des racines imaginaires ; c’est que les premieres donnent une solution au problème envisagé sous un aspect un peu différent, & qui ne differe point même dans le fond de la question proposée ; mais les imaginaires ne donnent aucune solution possible au problème de quelque maniere qu’on l’envisage. C’est que les racines négatives, avec de legers changemens à la question, peuvent devenir positives, au lieu que les imaginaires ne le peuvent jamais. Je suppose, que j’aye , ou en faisant , ; lorsque x est < a, y devient négative, & doit être prise de l’autre côté (voyez Courbe) ; pourquoi cela ? c’est que si on avoit reculé l’axe d’une quantité c, ce qui est absolument arbitraire, en sorte qu’au lieu des co-ordonnées x, y, on eût eu les co-ordonnées x &z, telles que z fût , alors on auroit eu , & en faisant x < a, z n’auroit plus été négative, ou plûtôt auroit continué à être encore positive pendant un certain tems : d’où l’on voit que la valeur négative de , appartient aussi-bien à la courbe que les valeurs positives ; ce qui a été développé plus au long au mot Courbe. Au contraire, si on avoit , & que x fût < a, alors on auroit beau transporter l’axe, la valeur de y resteroit imaginaire ; ainsi les racines négatives indiquent des solutions réelles, parce que ces racines deviennent positives par de legers changemens dans la solution ; mais les racines imaginaires indiquent des solutions impossibles, parce que ces racines ne deviennent jamais ni positives ni réelles par ces mêmes changemens. Voyez Equation & Racine.
Quand on a dit plus haut que le négatif commence où le positif finit, cela doit s’entendre avec cette restriction, que le positif ne devienne pas imaginaire. Par exemple, soit , il est visible que si x est > a, y sera positif, que si x = a, y sera = 0, & que si x < a, y sera négatif. Ainsi dans ce cas, le positif finit où y = 0, & le négatif commence alors ; mais si on avoit , alors x > a donne y positif, & x = a donne y = 0 ; mais x < a donne y imaginaire.
Le passage du positif au négatif, se fait toujours par zéro ou par l’infini. Soit, par exemple, y = x −a, on aura y positif tant que x > a, y négatif lors