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L’élasticité ou ressort des corps, ou cette propriété par laquelle ils reprennent la figure qu’ils avoient perdue à l’occasion d’une force externe, est encore une suite de la répulsion, selon le même philosophe. Voyez Elasticité. Chambers.

Nous nous contentons d’exposer ici ces opinions, qui à dire le vrai ne nous paroissent pas encore suffisamment constatées par les phénomenes. Prétendre que l’attraction devient répulsive, comme les quantités positives deviennent négatives en Algebre, c’est un raisonnement plus mathématique que physique. (O)

RÉPULSION, s. f. est l’action d’une faculté répulsive, par laquelle les corps naturels dans de certaines circonstances, se repoussent les uns les autres. Voyez Répulsif.

La répulsion est le contraire de l’attraction. L’attraction n’agit qu’à une petite distance du corps, & où elle cesse, la répulsion commence.

On trouve, selon plusieurs physiciens, beaucoup d’exemples de répulsion dans les corps ; comme entre l’huile & l’eau, & en général entre l’eau & tous les corps onctueux, entre le mercure & le fer, & entre quantité d’autres corps.

Si, par exemple, on met sur la surface de l’eau un corps gras, plus léger que l’eau, ou un morceau de fer sur du mercure, la surface du fluide baissera à l’endroit où le corps est posé. Ce phénomene, selon quelques auteurs, est une preuve de répulsion : comme l’élévation du fluide au-dessus de la surface des tuyaux capillaires qu’on y a enfoncés, est une marque d’attraction. Voyez Capillaire.

Dans le second cas, selon ces auteurs, le fluide est suspendu au-dessus de son niveau par une faculté attractive, supérieure à la force de sa gravité qui l’y réduiroit. Dans le premier, l’enfoncement se fait par la faculté répulsive, qui empêche que la liqueur nonobstant sa gravité, ne s’écoule par-dessous, & ne remplisse l’espace occupé par le corps.

C’est-là ce qui fait, selon les mêmes auteurs, que de petites bulles de verre flottant sur l’eau quand elles sont claires & nettes, l’eau s’éleve par-dessus ; au lieu que quand elles sont graissées, l’eau forme un creux tout autour. C’est aussi pourquoi dans un vaisseau de verre, l’eau est plus haute vers les bords du vaisseau que dans le milieu ; & qu’au contraire si on l’emplit comble, l’eau est plus haute au milieu que vers les bords.

Nous n’examinerons point ici la solidité de ces différentes explications ; nous nous contenterons d’observer que la répulsion, comme fait, ne peut être contestée du personne ; à l’égard de la cause qui peut la produire, c’est un mystere encore caché pour nous. Peut-être dans les différens phénomenes que nous observons, la répulsion pourroit-elle s’expliquer par une attraction plus forte vers le côté où le corps paroît repoussé ; & il est certain que, par exemple, la descension du mercure dans les tuyaux capillaires, n’est point une suite de la répulsion, mais de ce que le mercure attire plus fortement que le verre. Si l’on pouvoit expliquer aussi facilement les autres effets, il seroit inutile de faire un principe de la répulsion, comme on en fait un de l’attraction, qui peut être a elle-même une cause : car il ne faut pas multiplier les principes sans nécessité. (O)

REPURGER, v. a. (Gramm.) c’est purger une seconde fois. Voyez les articles Purgation & Purger.

RÉPUTATION, CONSIDÉRATION, (Synonymes.) Voici, selon madame de Lambert, la différence d’idées que donnent ces deux mots.

La considération vient de l’effet que nos qualités personnelles font sur les autres. Si ce sont des qualités grandes & élevées, elles excitent l’admiration : si

ce sont des qualités aimables & liantes, elles font naître le sentiment de l’amitié. L’on jouit mieux de la considération que de la réputation ; l’une est plus près de nous, & l’autre s’en éloigne : quoique plus grande, celle-ci se fait moins sentir, & se convertit rarement dans une possession réelle. Nous obtenons la considération de ceux qui nous approchent ; & la réputation, de ceux qui ne nous connoissent pas. Le mérite nous assure l’estime des honnêtes gens ; & notre étoile celle du public. La considération est le revenu du mérite de toute la vie ; & la réputation est souvent donnée à une action faite au hasard : elle est plus dépendante de la fortune. Savoir profiter de l’occasion qu’elle nous présente, une action brillante, une victoire, tout cela est à la merci de la renommée : elle se charge des actions éclatantes, mais en les étendant & les célébrant, elle les éloigne de nous. La considération qui tient aux qualités personnelles est moins étendue ; mais comme elle porte sur ce qui nous entoure, la jouissance en est plus sentie & plus répétée : elle tient plus aux mœurs que la réputation, qui quelquefois n’est dûe qu’à des vices d’usage bien placés & bien préparés ; ou d’autres fois, même à des crimes heureux & illustres. La considération rend moins, parce qu’elle tient à des qualités moins brillantes ; mais aussi la réputation s’use, & a besoin d’être renouvellée. (D. J.)

Réputation, (Morale.) C’est une sorte de problème dans la nature, dans la Philosophie, & dans la religion, que le soin de sa propre réputation & de son honneur.

La nature répand de l’agrément sur les marques d’estime qu’on nous donne ; & cependant elle attache une sorte de flétrissure à paroître les rechercher. Ne croiroit-on pas qu’elle est ici en contradiction avec elle-même ? Pourquoi proscrit-elle par le ridicule, une recherche qu’elle semble autoriser par le plaisir ? La Philosophie qui tend à nous rendre tranquilles, tend aussi à nous rendre indépendans des jugemens que les hommes peuvent porter de nous ; & l’estime qu’ils en font n’est qu’un de ces jugemens, entant qu’il nous est avantageux. Cependant la Philosophie la plus épurée, loin de réprouver en nous le soin d’être gens d’honneur ; non-seulement elle l’autorise, mais elle l’excite & l’entretient. D’un autre côté, la religion ne nous recommande rien davantage, que le mépris de l’opinion des hommes, & de l’estime qu’ils peuvent, selon leur fantaisie, nous accorder ou nous refuser. L’Evangile même porte les Saints à desirer & à rechercher le mépris ; mais en même tems le S. Esprit nous prescrit d’avoir soin de notre réputation.

La contrariété de ces maximes n’est qu’apparente : elles s’accordent dans le fonds ; & le point qui en concilie le sens, est celui qui doit servir de regle au bien de la société, & au nôtre en particulier. Nous ne devons point naturellement être insensibles à l’estime des hommes, à notre honneur & à notre réputation. Ce seroit aller contre la raison qui nous oblige d’avoir égard à ce qu’approuvent les hommes, ou à ce qu’ils improuvent le plus universellement & le plus constamment. Car ce qu’ils approuvent de la sorte, par un consentement presque unanime, est la vertu ; & ce qu’ils improuvent ainsi, est le vice. Les hommes, malgré leur perversité, font justice à l’un & à l’autre. Ils méconnoissent quelquefois la vertu ; mais ils sont obligés souvent de la reconnoître ; & alors ils ne manquent point de l’honorer : être donc insensible, par cet endroit, à l’honneur, je veux dire, à l’estime, à l’approbation & au témoignage que la conscience des hommes rend à la vertu, ce seroit l’être en quelque façon à la vertu même, qui y seroit intéressée. Cette sensibilité naturelle est comme une impression mise dans nos ames par l’auteur de notre être ; mais elle regarde seulement le tribut