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tourner le barillet, on bandera le ressort, & que la même chose arrivera si le barillet étant fixe, on tourne l’arbre.

Pour concevoir donc comment ce ressort met en mouvement toute la montre en faisant tourner le barillet, il faut remarquer que le barillet étant dans la cage, la roue de vis-sans-fin V, fig. 49, qui entre à quarré sur la tige de l’arbre du barillet, s’engage par les dents dans la vis-sans-fin C, fig. 42. de sorte que l’arbre devient fixe & ne peut tourner qu’autant qu’on fait mouvoir la roue au moyen de cette vis-sans-fin. L’arbre étant ainsi immobile, il est évident, par ce que nous avons dit plus haut, que si l’on tourne le barillet, on bandera le ressort, & c’est précisément ce qui arrive lorsque l’on monte la montre ; car la chaîne étant enveloppée sur le barillet & y tenant par une de ses extrémités, & par l’autre à la fusée, on ne peut faire tourner celle-ci ou remonter la montre, qu’on ne fasse en même-tems passer la chaîne sur la fusée, tourner le barillet, & par conséquent bander le ressort. Le ressort ainsi bandé tend à faire retourner la fusée en arriere, mais celle-ci, à cause de l’encliquetage, ne pouvant tourner en ce sens sans faire tourner aussi la grande roue avec elle, cette derniere communique son mouvement au pignon dans lequel elle engrene, & ainsi de suite. Cette action du ressort sur la fusée, comme nous venons de l’expliquer, seroit bien suffisante pour faire marcher la montre ; mais comme on a vû, article Fusée, que l’action du ressort transmise au rouage au moyen de la fusée, doit être toujours uniforme, & qu’il faut pour cet effet que son diametre, dans un point quelconque, soit en raison inverse de la force par laquelle le ressort agit dans ce même point, il s’ensuit que la force du ressort étant o, lorsqu’on commence à monter la montre, il faudroit que la base de la fusée sût infinie ; pour suppléer donc à cela, voici comme on s’y prend : la chaîne accrochée à la fusée & au barillet, étant enveloppée sur ce dernier ; au moyen de la vis-sans-fin on fait tourner l’arbre du barillet d’un tour plus ou moins ; or le barillet étant fixe, puisqu’il est retenu par la chaîne qui tient à la fusée, il s’ensuit que par-là on bandera le ressort de la même quantité dont on aura tourné l’arbre, c’est-à-dire, d’un tour plus ou moins, &c. & par conséquent que de quelque petit arc qu’on tourne la fusée, le ressort étant bandé d’un tour & du petit arc dont la chaîne aura fait tourner le barillet par ce mouvement, sa force sera assez considérable pour que la base de la fusée étant d’une certaine grandeur, son action par cette base puisse être en équilibre avec celle qu’il a dans les autres points ; cette quantité dont le ressort est ainsi bandé avant qu’on monte la montre s’appelle parmi les horlogers la bande, ainsi ils disent que la bande du ressort est de de de 1 tour, &c. pour dire qu’on a bandé le ressort de cette quantité, en tournant l’arbre de barillet, &c.

Pour peu qu’on fasse attention à la forme du ressort, fig. 48, on voit qu’à mesure qu’on le bande, en faisant mouvoir son extrémité de X vers K, les hélices ou lames X, L, &c. vont toujours en s’approchant les unes des autres & que par conséquent lorsqu’une fois elles se touchent, il est impossible de le bander davantage ; le nombre des tours que peut faire le point K, avant que les lames du ressort se touchent, s’appellent les tours du ressort, ainsi si l’arbre de barillet étant fixe l’on peut faire tourner le barillet six tours, jusqu’à ce que les lames du ressort se touchent, on dit que le ressort fait six tours, & qu’il est plus ou moins bandé selon qu’il s’en faut plus ou moins de tours qu’il ne soit dans cet état. Plus le ressort est bandé, plus toutes ses parties sont dans une grande contraction, & par conséquent plus il est sujet à casser, c’est pourquoi les habiles horlogers

observent qu’il ne le soit jamais trop, l’expérience leur a appris qu’il faut pour cela que la montre étant montée jusqu’au haut, il s’en faille encore aux environs d’un tour que le ressort ne soit bandé à son dernier degré, c’est-à-dire que s’il fait par exemple six tours il ne soit bandé que de cinq, le tour qui reste s’appelle la lesse. Voici comme ils s’en assurent : monter une montre n’étant, comme nous l’avons dit à l’article Fusée, que faire passer la chaîne de dessus le barillet sur la fusée, il s’ensuit que le ressort est toujours bandé d’un nombre de tours égal à celui des tours dont la chaîne s’enveloppe sur le barillet, & par conséquent que ces tours dépendent du rapport qui est entre le diametre de la fusée & celui du barillet ; ainsi la premiere étant fort grosse, la chaîne deviendra alors beaucoup plus longue, & en conséquence fera beaucoup de tours sur le barillet : or comme ces tours de la bande du ressort sont en même quantité, il faudra donc qu’il en fasse aussi beaucoup de plus, comme le ressort doit avoir un tour de bande plus ou moins & que lorsque la montre est montée jusqu’au haut, il ne doit pas être bandé tout au haut, & que, comme on vient de le dire, il doit y avoir au moins un tour de lesse, il s’ensuit que le ressort doit faire au moins deux tours de plus que la chaîne n’en fait sur le barillet, ainsi celle-ci faisant ordinairement 3 tours, le ressort en fait 5. Au reste que ce soient là les proportions que l’on observe ordinairement dans les montres, ces proportions varient selon les tours de la fusée & plusieurs autres circonstances. Une autre raison qui empêche de bander le ressort trop haut, c’est que sa force devenant très-considérable, la fusée deviendroit trop petite par en haut, ce qui augmenteroit beaucoup le frottement sur ses pivots ; on conçoit bien que si la lame du ressort est plus épaisse, il en aura plus de force, mais aussi que le nombre de tours qu’il fera dans le barillet sera moins considérable, & qu’au contraire si la lame est plus mince, le ressort fera plus de tours, mais qu’il sera moins fort. Il arrive quelquefois cependant que le ressort étant trop long par rapport au barillet dans lequel il est contenu, il ne fait pas autant de tours qu’il en feroit s’il étoit plus court ; alors on le rogne.

Pour qu’un ressort soit bien fait, il faut que son épaisseur aille un peu en diminuant d’un bout à l’autre, que la lame n’en soit pas trop épaisse, & qu’il ne soit ni trop long ni trop court ; dans le premier cas, le ressort étant dans le barillet, ses lames sont sujettes à se toucher & à se frotter, dans le second il est sujet à se casser, parce qu’elles souffrent une trop grande tension, il est sur-tout de la plus grande conséquence que les lames ne se frottent point, parce que 1°. ces frottemens diminuent de la force du ressort ; & 2°. qu’ils empêchent qu’on puisse égaler la fusée avec la même précision, & que cette égalité ne soit de durée, parce que les frottemens de ces lames variant continuellement changent les forces du ressort dans les différens points où ces lames sont en action, & par conséquent le rapport de ces forces avec les rayons de la fusée par lesquels elles agissent.

Tout ce que nous venons de dire des qualités que doit avoir un ressort, s’applique également à ceux des pendules. Dans les pendules où nous nous servons rarement de fusées ; pour éviter que les differences des forces du ressort dans le haut & dans le bas ne soient trop sensibles, on lui fait faire un peu plus de tours qu’il ne seroit nécessaire ; & au moyen d’un remontoir, on ne se sert que de ceux qui sont les plus égaux. Voyez Remontoir.

Les Anglois sont encore aujourd’hui ceux qui font les meilleurs ressorts pour les montres.

Ressort spiral, ou simplement spiral, signifie parmi les Horlogers un petit ressort courbé en ligne