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dieux avoient caché l’endroit mortel du fils de Thétis & de Pelée ? Mademoiselle Lenclos, plus éclairée que la plûpart des personnes de son sexe, n’avoit garde de prendre à la lettre les cajoleries de l’abbé de Chaulieu, qui prétendoit que l’amour s’étoit retiré dans les rides du front de cette belle personne. Elle nommoit elle-même ses rides le départ de l’amour, & les marques de la sagesse. Elles devroient l’être sans doute pour nous fortifier dans la philosophie, & pour nous aguerrir par de bonnes réflexions contre les frayeurs de la mort. (D. J.)

Rides, (Conchyl.) en latin rugæ ; les rides forment des ondes un peu élevées sur la superficie de la robe d’une coquille ; elles sont différentes des stries par leur irrégularité. Elles empêchent les coquillages de sortir de leurs coquilles au premier effort qu’ils font, ou au moindre obstacle qu’ils rencontrent en leur chemin. (D. J.)

Ride, (Marine.) corde qui sert à roidir une plus grosse.

Rides d’étai, (Marine.) rides qui servent à joindre l’étai avec son collier.

Rides de haubans, (Marine.) ce sont des cordes qui servent à bander les haubans, par le moyen des cadenes & des caps de mouton, qui se répondent par ces cordes. Celles qui sont entre les haubans de stribord & de bas-bord, s’appellent pantocheres. Elles bandent ces haubans & les soulagent, lorsque le vaisseau tombe de côté, en allant à la bouline ; car à mesure que les haubans de stribord se lâchent, ceux de bas-bord se roidissent & les tiennent en état.

On appelle aussi rides, les cordes qui amarrent le mât de beaupré à l’éperon.

RIDEAU, s. m. voile ou piece d’étoffe, de toile, de taffetas, &c. qu’on étend pour couvrir ou fermer quelque chose.

Rideau de fenêtre, terme de Tapissier ; on fait des rideaux de fenêtre avec du taffetas, du damas, de la serge, de la toile de coton, de fil, &c. dont on coud ensemble une certaine quantité de lez qu’on borde d’un ruban, au-haut desquels on coud des anneaux qu’on enfile dans une verge de fer, & qu’on tire avec des cordons pour empêcher la grande ardeur du soleil, ou pour d’autres besoins. (D. J.)

Rideau, (Art milit. des anciens.) les anciens couvroient leurs tours & les ouvrages qu’ils élevoient, avec des rideaux ou couvertures, pour les garantir des feux des assiégés, & des coups lancés par leurs machines. Ces rideaux étoient composés d’un tissu de crin & de peaux crues. On n’avoit garde de les appliquer contre les tours ; mais on suspendoit des couvertures en maniere de rideaux à certaine distance ; car quoiqu’il paroisse dans la plûpart des historiens, que ces couvertures étoient attachées & comme jointes à la charpente, on doit bien se garder de le croire. Ces rideaux ainsi disposés, n’auroient jamais pû résister aux traits & aux pieces lancées par les machines ; au lieu qu’étant suspendues à deux piés de la charpente, ils rompoient & amortissoient la force & la violence des coups. Folard. (D. J.)

Rideau, en terme de Fortification, signifie une petite élévation de terre, qui s’étend en longueur sur une surface de terre unie, laquelle sert à couvrir un camp, ou à donner de l’avantage à un poste. Ce mot signifie proprement une courtine ou couverture, formé du latin ridellum, que Borel dérive de ridere. Le rideau sert aussi aux assiégeans qui s’en couvrent pour ouvrir la tranchée plus près de la place, ou pour couvrir le parc d’artillerie, &c. Chambers. Ainsi dire qu’on a ouvert une tranchée à 400 toises de la place à la faveur d’un rideau, c’est dire qu’il s’est trouvé à cette distance une petite élévation de terre qui ne permettoit pas aux assiégés de découvrir plus loin dans la campagne.

On appelle encore quelquefois rideau, un fossé, ou plutôt une espece de tranchée destinée à mettre le soldat à couvert des coups de l’ennemi. Voyez Tranchée. (Q)

Rideau, (Topographie.) on nomme ainsi la berge élevée au-dessus du sol d’un chemin escarpé, sur le penchant d’une montagne, & qui fait en contre-haut ce que l’épaulement fait en contre-bas. (D. J.)

Rideaux, (Jardinage.) ce sont des palissades de charmille, qu’on pratique dans les jardins pour arrêter la vûe, afin qu’elle n’en saisisse pas tout-d’un-coup l’étendue : ce qui est une beauté. (D. J.)

RIDÉE, s. f. terme de Vénerie, les ridées, dit Salmore, sont les fientes & fumées des bêtes fauves, sur-tout des vieux cerfs & vieilles biches. (D. J.)

RIDELLES, ou BRANCART, terme de Charron ; ce sont deux morceaux de bois ronds par un bout & quarré à l’endroit où ils sont attachés aux côtés de devant du tombereau, de façon que cela forme le brancart pour y atteler le limonnier : les deux bouts ronds sont percés de chacun un trou dans lesquels se posent des chevilles, pour arrêter les traits du cheval de cheville.

RIDER, v. act. (Gram.) faire des rides. Voyez l’article Ride.

Rider la voile, (Marine.) voyez Ris.

Rider, (Marine.) c’est roidir.

Rider, (Vénerie.) se dit d’un chien qui suit la voie d’une bête sans crier.

RIDICULE le, s. m. (Morale.) je demande moi-même ce que c’est que le ridicule, on ne l’a point encore défini ; c’est un terme abstrait dont le sens n’est point fixe ; il varie perpétuellement, & releve comme les modes du caprice & de l’arbitraire ; chacun applique l’idée du ridicule, la change, l’étend, & la restraint à sa fantaisie. Un homme est taxé de ridicule dans une société pour avoir quitté de faux airs ; & ces mêmes faux airs dans une autre société, le comblent de ridicules.

On confond communément le ridicule avec ce qui est contre la raison ; cependant ce qui est contre la raison est folie : si c’est contre l’équité, c’est un crime.

Le ridicule devroit se borner aux choses indifférentes en elles-mêmes, & consacrées par les usages reçus ; la mode, les habits, le langage, les manieres, le maintien ; voilà son ressort. Voici son usurpation.

Il étend son empire sur le mérite, l’honneur, les talens, la considération, & les vertus ; sa caustique empreinte est ineffaçable ; c’est par elle qu’on attaque dans le fond des cœurs le respect qu’on doit à la vertu ; il éteint enfin l’amour qu’on lui porte : tel rougit d’être modeste, qui devient effronté par la crainte du ridicule ; & cette mauvaise crainte corrompt plus de cœurs honnêtes, que les mauvaises inclinations.

Le ridicule est supérieur à la calomnie qui peut se détruire en retombant sur son auteur ; & c’est aussi le moyen que l’envie employe le plus sûrement pour ternir l’éclat des hommes supérieurs aux autres.

Le deshonorant offense moins que le ridicule ; la raison en est qu’il n’est au pouvoir de personne d’en deshonorer un autre. C’est notre propre conduite, & non les discours d’autrui qui nous deshonorent ; les causes du deshonneur sont connues & certaines ; mais le ridicule dépend de la maniere de penser & de sentir qu’ont les gens vicieux, pour tâcher de nous dégrader, en mettant la honte & la gloire par-tout où ils jugent à propos, & sur tous les objets qu’ils envisagent par les lunettes du ridicule.

Le pouvoir de son empire est si fort, que quand l’imagination en est une fois frappée, elle ne connoît plus que sa voix. On sacrifie souvent son honneur à