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peuple à Lacédémone avoit une maniere toute particuliere de donner ses suffrages. Pour autoriser une proposition, il faisoit de grandes acclamations, & pour la rejetter il gardoit le silence ; mais en même tems pour lever tous les doutes en fait d’acclamations ou de silence, la loi ordonnoit à ceux de l’assemblée qui étoient d’un avis, de se placer d’un côté, & à ceux de l’opinion contraire, de se ranger de l’autre ; ainsi le plus grand nombre étant connu, décidoit la majorité des suffrages sans erreur, & sans équivoque. (D. J.)

Suffrage secret, (Hist. d’Athènes.) c’étoit une des deux manieres d’opiner des Athéniens. Ce peuple opinoit de la main dans les affaires d’état ; voyez ce que nous avons dit de cette pratique ; & il opinoit par suffrage secret, ou par scrutin, dans les causes criminelles. Pour cet effet, on apportoit à chaque tribu deux urnes, l’une destinée pour condamner, & l’autre pour absoudre ; la loi ne voulant point commettre ses ministres à la haine de ceux que le devoir ou la tendresse intéressoit en faveur de l’accusé, ordonna le suffrage secret, ou le scrutin, qui cachoit même aux juges l’avis de leurs confreres. Cet usage prévenoit encore les animosités dangereuses, qui souvent à cette occasion, passent des peres aux enfans, & se perpétuent dans les familles.

SUFFRUTEX, sous-arbrisseau, en Botanique, est un nom qu’on donne à la plus petite espèce de plantes boiseuses, & qui durent toute l’année, qui ne jettent point de feuilles de leurs racines, & qui commencent à pousser des branches par le haut de leur tige. Tels sont la lavande, la rüe, la sauge, &c. Voyez Plante, Arbre, &c.

SUFFUMIGATION, en médecine, est la même chose que fumigation. Voyez Fumigation.

SUFFUSION, s. f. terme de chirurgie, maladie de l’œil, c’est la même chose que la cataracte. Voyez Cataracte & Extraction.

SUGULMESSE, (Géog. mod.) province d’Afrique. Voyez Ségelmesse. (D. J.)

SUGGESTION, s. f. (Gram. & Jurisprud.) est lorsque l’on insinue à quelqu’un de faire une chose, comme un testament, une donation.

La suggestion est un moyen de nullité contre les actes qui en sont infectés, & surtout pour les testamens faits en maladie, ou dans une extrème vieillesse, parce que les personnes âgées ou malades sont plus susceptibles de suggestion que d’autres.

Quelques coutumes exigeoient pour la validité des testamens que l’on y fît mention que le testateur l’avoit fait sans suggestion de personne ; mais comme cette énonciation pouvoit-elle même être suggérée, la nouvelle ordonnance en a abrogé la nécessité. Voyez Capitation, Testament. (A)

SUGGESTUM ou SUGGESTUS, s. m. (Littérat.) c’étoit un endroit du champ de Mars assez élevé, où tous les magistrats, suivant leur rang & leurs titres, se rendoient pour haranguer le peuple ; car les particuliers n’avoient point ce droit, à-moins qu’ils n’en eussent obtenu la permission de quelque magistrat éminent. Les tribuns faisoient aussi monter dans cet endroit les personnes qu’ils dénonçoient au peuple comme coupables de quelque crime d’état. (D. J.)

SUGGRONDE, s. f. (terme de Couvreur.) les Couvreurs donnent le nom de suggronde aux saillies qu’ils font au bas des couvertures, pour rejetter les eaux pluviales loin du mur, & empêcher qu’elles ne l’endommagent. (D. J.)

SUGILLATION, s. f. (Médec.) on donne quelquefois le nom de sugillation, ou lividité, au taches livides qui restent après la succion d’une partie vasculeuse ; en voici l’explication.

Lorsque la pression de l’athmosphere sur la surface de quelque partie du corps que ce soit, vient à

diminuer, ou à cesser tout-à-fait, soit par la succion ou par l’application des ventouses, le sang se porte aux parties qui sont le moins pressées par l’air, détend les vaisseaux, & entre dans les plus petits qui se trouvent dilatés, & qui naturellement ne contiennent point de sang rouge ; il arrive même souvent qu’il s’y engorge si fort, qu’il produit des taches rouges, livides & noires ; ces taches sont l’effet de cette sugillation. (D. J.)

SUI ou SSI-NO-KI, s. m. (Hist. nat. Botan.) c’est un hêtre du Japon, qui a des feuilles de frêne, dont la fleur est hexapétale, & ramassée en épis. Son fruit est une noix renfermée dans une coque écailleuse, garnie de pointes & de la grosseur d’une aveline.

SUICIDE, s. m. (Morale.) le suicide est une action par laquelle un homme est lui-même la cause de sa mort. Comme cela peut arriver de deux manieres, l’une directe & l’autre indirecte ; on distingue aussi dans la morale le suicide direct, d’avec le suicide indirect.

Ordinairement on entend par suicide, l’action d’un homme, qui de propos délibéré se prive de la vie d’une maniere violente. Pour ce qui regarde la moralité de cette action, il faut dire qu’elle est absolument contre la loi de la nature. On prouve cela de différentes façons. Nous ne rapporterons ici que les raisons principales.

1°. Il est sûr que l’instinct que nous sentons pour notre conservation, & qui est naturel à tous les hommes, & même à toutes les créatures, vient du créateur. On peut donc la regarder comme une loi naturelle gravée dans le cœur de l’homme par le créateur. Il renferme ses ordres par rapport à notre existence. Ainsi tous ceux qui agissent contre cet instinct qui leur est si naturel, agissent contre la volonté de leur créateur.

2°. L’homme n’est point le maître de sa vie. Comme il ne se l’est point donnée, il ne peut pas la regarder comme un bien dont il peut disposer comme il lui plaît. Il tient la vie de son créateur ; c’est un espece de dépôt qu’il lui a confié. Il n’appartient qu’à lui de retirer son dépôt quand il le trouvera à propos. Ainsi l’homme n’est point en droit d’en faire ce qu’il veut, & encore moins de le détruire entierement.

3°. Le but que le créateur a en créant un homme, est sûrement qu’il continue à exister & à vivre aussi long-tems qu’il plaira à Dieu : & comme cette fin seule n’est pas digne d’un Dieu si parfait, il faut ajouter qu’il veut que l’homme vive pour la gloire du créateur, & pour manifester ses perfections. Or ce but est frustré par le suicide. L’homme en se détruisant, enleve du monde un ouvrage qui étoit destiné à la manifestation des perfections divines.

4°. Nous ne sommes pas au monde uniquement pour nous-mêmes. Nous sommes dans une liaison étroite avec les autres hommes, avec notre patrie, avec nos proches, avec notre famille. Chacun exige de nous certains devoirs auxquels nous ne pouvons pas nous soustraire nous-mêmes. C’est donc violer les devoirs de la société que de la quitter avant le tems, & dans le moment où nous pourrions lui rendre les services que nous lui devons. On ne peut pas dire qu’un homme se puisse trouver dans un cas où il soit assuré qu’il n’est d’aucune utilité pour la société. Ce cas n’est point du tout possible. Dans la maladie la plus désespérée, un homme peut toujours être utile aux autres, ne fût-ce que par l’exemple de fermeté, de patience, &c. qu’il leur donne.

Enfin la premiere obligation où l’homme se trouve par rapport à soi-même, c’est de se conserver dans un état de félicité, & de se perfectionner de plus en plus. Ce devoir est conforme à l’envie que chacun a de se rendre heureux. En se privant de la vie on né-