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exposé que les deux autres aux incursions des Tartares qui sont limitrophes. (D. J.)

TIBIA, s. m. en Anatomie, est un des deux os de la jambe, situé entre le genou & la cheville du pié. Voyez Pied.

Le tibia est semblable à une ancienne espece de flûte, d’où est venu son nom latin tibia.

Le tibia est le plus interne & le plus gros des os de la jambe. Voyez Pl. Anat. (Ostéol.). Voyez l’article Os.

Le tibia est d’une substance dure & ferme dans sa partie moyenne & spongieuse dans ses extrémités : il a dans son milieu une assez grande cavité qui sert à contenir la moëlle. Voyez Moelle.

Il est presque triangulaire dans sa longueur ; son angle antérieur qui est aigu se nomme crête. A son extrémité supérieure, il a deux grandes cavités ou sinus, qui sont revêtues, tapissées, d’un cartilage poli nommé à cause de sa figure, cartilage semi-lunaire. Ce cartilage se trouve entre les extrémités des deux os, & devient fort mince à son bord ; il sert à faciliter le petit mouvement latéral du génou, ayant le même usage que celui qui est dans l’articulation de la mâchoire inférieure.

Les deux sinus dont nous avons parlé, reçoivent les deux éminences du fémur ou os de la cuisse ; & l’éminence qui est entre ces deux sinus, est reçue dans le sinus qui sépare les deux éminences du fémur. Voyez Fémur.

En pliant le genou lorsque nous marchons, nous portons en droite ligne la jambe en-devant ; ce que nous n’aurions pû faire sans l’articulation du genou ; mais semblables à ceux qui ont le malheur d’avoir une jambe de bois, nous eussions été obligés d’avancer le pié en demi-cercle, même en marchant dans la plaine, & beaucoup plus en montant.

A la face externe de l’extrémité supérieure du tibia, se voit une petite éminence qui est reçue dans une petite cavité du péroné ; & à la partie antérieure, un peu au-dessous de la rotule, il y a une autre éminence, où s’inserent les tendons des muscles extenseurs de la jambe.

L’extrémité inférieure du tibia, qui est beaucoup plus petite que la supérieure, a une apophyse considérable, qui forme la malleole interne ; & une assez grande cavité qui est partagée dans son milieu par une petite éminence. La cavité ou sinus reçoit la partie convexe de l’astragale ; & l’éminence est reçue dans l’enfoncement sur la partie latérale interne du même os. On voit à la face externe de l’extrémité inférieure du tibia une autre cavité superficielle qui reçoit le péroné.

M. Cheselden rapporte l’exemple d’un enfant de sept ans, qui avoit les deux épiphyses de l’extrémité supérieure du tibia tellement éloignées l’une de l’autre, que la moitié seulement de chaque tibia étoit jointe à chaque moitié d’épiphyse ; ce qui lui ôtoit entierement l’usage de ses jambes. Cet accident étoit arrivé par la faute de la nourrice, qui lorsque l’enfant étoit fort petit, le soutenoit par les talons & le dos sur la chaise percée ; ce qui n’est que trop ordinaire aux nourrices, comme le remarque le même M. Cheselden.

Le tibia a un contour particulier qui échappe quelquefois aux yeux des Anatomistes, & dont l’ignorance peut faire grand tort dans le pansement des fractures de cet os ; on sait qu’il est large en-haut & en-bas, mais on ne prend pas toujours garde que ces deux largeurs ne sont pas dans le plan, comme il paroît d’abord ; car la malléole interne est un peu tournée en devant, & l’enfoncement opposé qui sert à recevoir l’extrémité inférieure du péroné ou malleole externe, est un peu tournée en arriere ; cette fracture paroîtra encore mieux dans un tibia couché sur

un plan égal ; alors on verra que le plus grand diametre de la tête du tibia sera parallele à ce plan, & celui de la base sera oblique dans le sens que je viens de marquer ; il suit de-là, que le pié se tourne naturellement en-dehors. (D. J.)

TIBII, (Géog. anc.) peuples d’Asie, aux environs de la grande Arménie, selon Ortélius, qui cite Cedrene & Curopalate, & ajoute que leur métropole se nommoit Tibium. Galien, l. I. meth. medendi, fait aussi mention de ces peuples. (D. J.)

TIBIR, s. m. terme de relation ; nom que l’on donne à la poudre d’or en plusieurs endroits des côtes d’Afrique.

TIBISCA, (Géog. anc.) ville de la basse Mæsie, selon Ptolomée, l. II. c. x. Le nom moderne est Sophia, à ce que dit Niger.

TIBISCUS, (Géogr. anc.) fleuve de la Dace, selon Ptolomée, l. III. c. vij. Pline, l. IV. c. xij. l’appelle Pathissus ; il a sa source dans les monts Crapac, & son embouchure dans le Danube, un peu au-dessous de celle de la Save. Le nom moderne est Theisse. (D. J.)

TIBOSE, s. f. (Monnoie du Mogol.) c’est une des roupies qui a cours dans les états du grand-mogol. Elle vaut le double de la roupie gasana qui vaut cinquante sols de France.

TIBRE, (Monum. Médailles.) ce fleuve qui baigne les murs de Rome, se trouve personnifié sur les monumens & les médailles sous la figure d’un vieillard couronné de laurier, à demi-couché ; il tient une corne d’abondance, & s’appuie sur une louve, auprès de laquelle sont deux petits enfans, Rémus & Romulus. C’est ainsi qu’on le voit représenté dans ce beau grouppe en marbre, qui est au jardin des Tuileries, copié sur l’antique à Rome. (D. J.)

Tibre, (Mythol.) si le fleuve Inachus, l’Eurotas & l’Alphée ont été célebrés par les Grecs, les Romains ne solemniserent pas le Tibre avec moins de vénération. Virgile ne le nomme jamais sans quelque épithète magnifique ; ses eaux sont chéries du ciel, cœlo gratissimus amnis. Dans quelle majesté ce prince des poëtes ne fait-il pas apparoître en songe le dieu du Tibre à Enée, souverain maître du lieu où ce héros reposoit, & aussi versé que Jupiter même dans la connoissance de l’avenir, il lui annonce la grandeur de ses destinées, & l’instruit de ce qu’il doit faire pour s’en rendre digne :

Huic deus ipse loci fluvio Tiberinus amœno
Populeas inter senior se attollere frondes
Visus : cum tenuis glauco velabat amictu
Carbasus, & crines umbrosa tegebat arundo.

Æneid. l. VIII. v. 64.

« Alors le dieu du Tibre sous la figure d’un vieillard, lui sembla à-travers les peupliers, sortir de son lit, les épaules couvertes d’un voile bleu de toile fine, & la tête chargée de roseaux ».

Enée se tournant vers l’orient, selon l’usage observé dans l’invocation des dieux célestes, prend de l’eau du Tibre dans ses mains (autre pratique usitée dans l’invocation des fleuves), & adressant sa priere au dieu du Tibre, comme à la divinité tutélaire du pays, il exalte la sainteté de ses eaux, & l’honore du titre superbe de maître de l’Italie ; il implore sa protection, & jure de ne jamais cesser de lui rendre ses hommages.

Tuque, ô Tibri, tuque ô genitor cum flumine sancto
Accipite Æneam, & tandem arcete periclis.
Semper honore meo, semper celebrabere donis :
Corniger Hesperidum ; fluvius regnator aquarum,
Adsis, ô tandem, & propiùs tua flumina firmes.

Æneid. l. VIII. v. 72.

« Dieu du Tibre, s’écria-t-il, recevez Enée sur vos eaux, & garantissez le des périls qui le menacent.