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ches du Rhone, les bouches du Nil, &c. Quelquefois on l’applique à certains passages de la mer resserrés entre les terres, comme les bouches de Boniface, entre la Corse & la Sardaigne. (Z)

Bouche, Bosson, Besson ; voyez Bouge & Besson.

Bouche, dans les tuyaux d’Orgue ; on appelle ainsi l’ouverture du tuyau par laquelle l’air qu’il contient sort. On a ainsi appellé cette partie par analogie à la bouche de l’homme, parce que c’est par cette ouverture que le tuyau parle : la largeur entre les deux levres 3 & 0, fig. 30. Pl. d’Orgue, doit être le quart de leur longueur bb, pour qu’elle parle avec le plus d’avantage qu’il est possible ; car si elle est trop ouverte, le tuyau ne parle presque pas ; & si elle l’est trop peu, le tuyau ne fait entendre qu’un siflement desagréable.

Bouche ovale, sorte de bouche des tuyaux d’Orgue laquelle est arrondie par le haut, comme la figure 31. Plan. d’Orgue le représente.

Pour trouver le trait de cette bouche, soit db, fig. 31. n° 2. sa largeur ; il faut diviser cette largeur en deux au point 3, élever perpendiculairement la ligne 3 e, sur laquelle on prendra 3 f égale à db ; du point f, comme centre, & d’un rayon moitié de db, on décrira la demi-circonférence e, qui avec les deux perpendiculaires aux points d & b, terminera la figure de la bouche ovale. Voyez Orgue.

Bouche en pointe, c’est ainsi que l’on nomme la bouche des tuyaux d’orgue dont la levre supérieure, figure 33. Plan. d’Orgue, est faite en triangle isoscele abc ; bc est la largeur de la bouche ; c 2 une fois & demie cette largeur qui est la hauteur de la bouche, que l’on forme en tirant les deux lignes égales ac & ab. Voyez l’article Orgue.

Bouche de four, en terme de Boulanger, est une ouverture en quarré ou cintrée, par laquelle on met le bois & le pain dans le four. Voyez fig. 1. du Boulanger ; ABCD est la bouche du four, & CDEF, la plaque de fer avec laquelle on le ferme, en levant cette plaque qui fait charniere dans la ligne CD. Voyez la fig. 2. qui est le profil du four sur sa longueur.

* BOUCHER, s. m. (Police anc. & mod. & Art.) celui qui est autorisé à faire tuer de gros bestiaux, & à en vendre la chair en détail.

La viande de boucherie est la nourriture la plus ordinaire après le pain, & par conséquent une de celles qui doit davantage & le plus souvent intéresser la santé. La police ne peut donc veiller trop attentivement sur cet objet : mais elle prendra toutes les précautions qu’il comporte, si elle a soin que les bestiaux destinés à la boucherie soient sains ; qu’ils soient tués & non morts de maladie, ou étouffés ; que l’apprêt des chairs se fasse proprement, & que la viande soit débitée en tems convenable.

Il ne paroît pas qu’il y ait eû des Bouchers chez les Grecs, au moins du tems d’Agamemnon. Les héros d’Homere sont souvent occupés à dépecer & à faire cuire eux-mêmes leurs viandes ; & cette fonction qui est si desagréable à la vûe n’avoit alors rien de choquant.

A Rome il y avoit deux corps ou colléges de Bouchers, ou gens chargés par état de fournir à la ville les bestiaux nécessaires à sa subsistance : il n’étoit pas permis aux enfans des Bouchers de quitter la profession de leurs peres, sans abandonner à ceux dont ils se séparoient la partie des biens qu’ils avoient en commun avec eux. Ils élisoient un chef qui jugeoit leurs différends : ce tribunal étoit subordonné à celui du préfet de la ville. L’un de ces corps ne s’occupa d’abord que de l’achat des porcs, & ceux qui le composoient en furent nommés suarii : l’autre étoit pour l’achat & la vente des bœufs ; ce qui fit appeller ceux

dont il étoit formé, boarii ou pecuarii. Ces deux corps furent réunis dans la suite.

Ces marchands avoient sous eux des gens dont l’emploi étoit de tuer les bestiaux, de les habiller, de couper les chairs, & de les mettre en vente ; ils s’appelloient laniones ou lanii, ou même carnifices : on appelloit lanienæ, les endroits où l’on tuoit, & macella, ceux où l’on vendoit. Nous avons la même distinction ; les tueries ou échaudoirs de nos Bouchers répondent aux lanienæ, & leurs étaux aux macella.

Les Bouchers étoient épars en différens endroits de la ville ; avec le tems on parvint à les rassembler au quartier de Cœlimontium. On y transféra aussi les marchés des autres substances nécessaires à la vie, & l’endroit en fut nommé macellum magnum. Il y a sur le terme macellum un grand nombre d’étymologies qui ne méritent pas d’être rapportées.

Le macellum magnum, ou la grande boucherie, devint sous les premieres années du regne de Néron un édifice à comparer en magnificence aux bains, aux cirques, aux aquéducs, & aux amphithéatres. Cet esprit qui faisoit remarquer la grandeur de l’empire dans tout ce qui appartenoit au public, n’étoit pas entierement éteint : la mémoire de l’entreprise du macellum magnum fut transmise à la postérité par une médaille où l’on voit par le frontispice de ce bâtiment, qu’on n’y avoit épargné ni les colonnes, ni les portiques, ni aucune des autres richesses de l’architecture.

L’accroissement de Rome obligea dans la suite d’avoir deux autres boucheries : l’une fut placée in regione Esquilina, & fut nommée macellum Livianum ; l’autre in regione fori Romani.

La police que les Romains observoient dans leurs boucheries s’établit dans les Gaules avec leur domination ; & l’on trouve dans Paris, de tems immémorial, un corps composé d’un certain nombre de familles chargées du soin d’acheter les bestiaux, d’en fournir la ville, & d’en débiter les chairs. Elles étoient réunies en un corps où l’étranger n’étoit point admis, où les enfans succédoient à leurs peres, & les collatéraux à leurs parens ; où les mâles seuls avoient droit aux blens qu’elles possédoient en commun, & où par une espece de substitution, les familles qui ne laissoient aucun hoir en ligne masculine, n’avoient plus de part à la société ; leurs biens étoient dévolus aux autres jure accrescendi. Ces familles élisoient entr’elles un chef à vie, sous le titre de maître des Bouchers, un greffier, & un procureur d’office. Ce tribunal subordonné au prevôt de Paris, ainsi que celui des Bouchers de Rome l’étoit au préfet de la ville, décidoit en premiere instance des contestations particulieres, & faisoit les affaires de la communauté.

On leur demanda souvent leur titre, mais il ne paroît pas qu’ils l’ayent jamais fourni ; cependant leur privilége fut confirmé par Henri II. en 1550, & ils ne le perdirent en 1673, que par l’édit général de la réunion des justices à celle du Châtelet.

Telle est l’origne de ce qu’on appella dans la suite la grande boucherie ; l’accroissement de la ville rendit nécessaire celui des boucheries, & l’on en établit en différens quartiers ; mais la grande boucherie se tint toûjours séparée des autres, & n’eut avec elles aucune correspondance, soit pour la jurande, soit pour la discipline.

A mesure que les propriétaires de ces boucheries diminuerent en nombre & augmenterent en opulence, ils se dégoûterent de leur état, & abandonnerent leurs étaux à des étrangers. Le Parlement qui s’apperçut que le service du public en souffroit, les contraignit d’occuper ou par eux-mêmes ou par des serviteurs : de-là vinrent les étaliers Bouchers. Ces étaliers demanderent dans la suite à être maîtres, & on le leur accorda : les Bouchers de la grande boucherie