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le rhumb. On peut prouver de la même maniere que cette carte représente véritablement les milles de longitude.

Il s’ensuit de-là qu’on peut se servir utilement des cartes planes pour diriger un vaisseau dans un voyage qui ne soit pas de long cours, ou même dans un voyage assez long, pourvû qu’on ait soin qu’il ne se glisse point d’erreur dans la distance des lieux F & G, ce qu’on corrigera de la maniere suivante.

Construction d’une échelle pour corriger les erreurs des distances dans les cartes planes. 1°. Transportez cinq degrés de la carte à la droite AB, fig. 10, & divisez-les en 300 parties égales ou milles géographiques ; 2°. décrivez sur cette droite un petit cercle ACB, qu’il faudra diviser en 90 parties égales : si l’on veut savoir en conséquence, combien cinq degrés font de milles dans le parallele de cinquante, qu’on prenne au compas l’intervalle AC égal à cinquante, & qu’on le transporte au diametre AB, sur lequel il marquera le nombre de milles requis.

Il s’ensuit de-là que si un vaisseau fait voile sur un rhumb à l’est ou à l’ouest, hors de l’équateur, les milles correspondans aux degrés de longitude, se trouveront comme dans l’article précédent ; s’il fait voile sur un rhumb collatéral, alors on peut supposer toûjours la course de l’est à l’ouest dans un parallele moyen entre le parallele du lieu d’où le vaisseau vient, & de celui où il va.

Il est vrai que cette réduction par une parallele moyenne arithmétique n’est pas exacte : cependant on s’en sert souvent dans la pratique, parce que c’est une méthode commode pour l’usage de la plûpart des marins. En effet, elle ne produira point d’erreur considérable, si toute la course est divisée en parties dont chacune ne passe pas un degré ; ce qui fait qu’il est convenable de ne pas prendre le diametre du demi-cercle ACB de plus d’un degré, & de le diviser au plus en milles géographiques. Pour l’application des cartes planes à la navigation, voyez Navigation.

Carte réduite, ou carte de réduction : c’est celle dans laquelle les méridiens sont représentés par des droites convergentes vers les poles, & les paralleles par des droites paralleles les unes aux autres, mais inégales. Il paroît donc par leur construction qu’elles doivent corriger les erreurs des cartes planes.

Mais puisque les paralleles y devroient couper les méridiens à angles droits, il s’ensuit aussi que ces cartes sont défectueuses à cet égard, puisqu’elles représentent les paralleles comme inclinés aux méridiens ; c’est ce qui a fait imaginer une autre espece de cartes réduites, dans lesquelles les méridiens sont paralleles, mais les degrés inégaux ; on les appelle cartes de Mercator.

Carte de Mercator : c’est celle dans laquelle les méridiens & les paralleles sont représentés par des droites paralleles, mais où les degrés des méridiens sont inégaux, & croissent toûjours à mesure qu’ils s’approchent du pole dans la même raison que ceux des paralleles décroissent sur le globe ; au moyen de quoi, ils conservent entre eux la même proportion que sur le globe.

Cette carte tire son nom de celui de l’auteur qui l’a proposée le premier, & qui a fait la premiere carte de cette construction, savoir de N. Mercator : mais il n’est ni le premier qui en ait eu l’idée (car Ptolomée y avoit pensé quinze cents ans auparavant) ni celui à qui on en doit la perfection ; M. Whright étant le premier qui l’ait démontrée, & qui ait enseigné une maniere aisée de la construire, en étendant la ligne méridienne par l’addition continuelle des sécantes.

Construction de la carte de Mercator. 1°. Tirez une droite, & divisez-la en parties égales, qui représen-

tent les degrés de longitude, soit dans l’équateur, soit

dans les paralleles qui doivent terminer la carte ; élevez de ces différens points de division des perpendiculaires qui représentent les différens méridiens, de façon que des droites puissent les couper toutes sous un même angle, & par conséquent représenter les rhumbs ; & vous ferez le reste comme dans la carte plane, avec cette condition de plus, que pour que les degrés des méridiens soient dans la proportion convenable avec ceux des paralleles, il faut augmenter les premiers ; car les derniers restent les mêmes à cause du parallélisme des méridiens. Voyez Degré.

Décrivez donc dans l’équateur CD, & de l’intervalle d’un degré, (Pl. Navig. fig. 11.) le quart de cercle DLE, & élevez en D la perpendiculaire DG ; faites l’arc DL égal à la latitude, & par le point L tirez CG ; cette droite CG sera le degré du méridien propre à être transporté sur le méridien de la carte ; le reste se fera comme dans les cartes planes. Supposons qu’on demande dans la pratique de construire une carte plane de Mercator, depuis le quarantieme jusqu’au cinquantieme degré de latitude boréale, & depuis le sixieme jusqu’au quinzieme degré de longitude ; tirez d’abord une droite qui représente le quarantieme parallele de l’équateur, & divisez-la en douze parties égales, pour les douze degrés de longitude que la carte doit contenir ; prenez ensuite une ligne de parties égales, sur l’échelle de laquelle ces parties soient égales à chacun des degrés de longitude, & à chacune de ses extrémités élevez des perpendiculaires, pour représenter deux méridiens paralleles, qu’il faut diviser au moyen de l’addition continuelle des sécantes, lesquelles on démontre croître dans la même proportion que les degrés de longitude décroissent. Voyez Sécante.

Ainsi pour la distance de 40d de latitude à 41d, prenez 131 parties égales de l’échelle, qui font la sécante de 40d 30′ ; pour la distance de 41d à 42d, prenez 133 parties égales de l’échelle, qui font la sécante de 41d 30′, & ainsi de suite jusqu’au dernier degré de votre carte, qui contiendra 154 de ces parties égales, lesquelles font la sécante de 49d 30′, & doivent donner par conséquent la distance du 49d de latitude au 50. Par cette méthode les degrés de latitude se trouveront évidemment augmentés dans la proportion suivant laquelle les degrés de longitude décroissent sur le globe.

Le méridien étant divisé, il faudra y ajoûter la boussole ou le compas de mer : choisissant pour cela quelqu’endroit convenable dans le milieu, on tirera par cet endroit une parallele au méridien divisé, laquelle sera le rhumb de nord ; & au moyen de celle-ci on aura les 31 autres points de compas : enfin on rapportera les villes, les ports, les côtes, les îles, &c. au moyen d’une table de latitude & de longitude, & la carte sera finie.

Dans la carte de Mercator, l’échelle change à proportion des latitudes : si par conséquent un vaisseau fait voile entre le 40 & le 50 de la parallele de latitude, les degrés des méridiens entre ces deux paralleles devront servir d’échelle pour mesurer le chemin du vaisseau ; d’où il s’ensuit que quoique les degrés de longitude soient égaux en longueur sur la carte, ils doivent néanmoins contenir un nombre inégal de milles ou de lieues, & qu’ils décroîtront à mesure qu’ils approcheront plus près du pole, parce qu’ils sont en raison inverse d’une quantité qui croît continuellement.

Cette carte est très-bonne, quoique fausse en apparence : on trouve par expérience qu’elle est fort exacte, & qu’il est en même tems fort aisé d’en faire usage. En effet elle a toutes les qualités requises pour l’usage de la navigation. La plûpart des marins, dit Chambers, paroissent cependant éloignés de s’en