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inconvéniens des purgatifs forts, que de les bien choisir & les préparer exactement, de les donner à propos & en une dose convenable.

Quant à la qualité froide des narcotiques, nous avons appris à ne pas la craindre dans ceux que nous retirons des pavots, qui sont les seuls que nous mettions aujourd’hui en usage. L’expérience nous a appris qu’une décoction d’une tête de pavot, ou l’opium sans préparation, étoient tout aussi efficaces & aussi peu dangereux, que les opiatiques corrigés des anciens, & même que le fameux laudanum liquide de Sydenham, qui paroît être fait d’après les mêmes principes, ou plûtôt d’après les mêmes préjugés.

Il est une autre espece de correctifs d’activité, aussi réels que ceux dont nous venons de parler paroissent imaginaires : ce sont les différens corps doux ou muqueux, tels que les pulpes de pruneaux, de tamarin, de casse ; les décoctions de fruits doux, le sucre, le miel, la manne, &c. que l’on mêle avec les purgatifs les plus forts dans certains électuaires dont l’usage est encore assez ordinaire, sur-tout dans les hôpitaux. Ces correctifs masquent la violence de ces purgatifs au point que les électuaires dont nous parlons sont des purgatifs assez doux, à une dose qui contient une quantité de ces purgatifs, fort capable de produire les effets les plus violens, s’ils étoient donnés sans mêlange. C’est ainsi que dans le diaprun solutif, p. ex. l’activité de la scammonée est assez tempérée par la pulpe des pruneaux & par le sucre, pour qu’une once de cet électuaire qui contient un scrupule de scammonée, ne soit pas un purgatif si dangereux à beaucoup près, que le seroit la même dose de scammonée donnée sans mêlange. Le sucre qui donne la consistance aux syrops purgatifs, tempere aussi jusqu’à un certain point l’activité des remedes qui en font la vertu. La décoction des fruits doux & de certaines autres substances végétales, comme les racines de réglisse, de polipode, la scolopendre, & les autres capillaires, diminuent un peu l’énergie de certains purgatifs, comme du sené ; ensorte qu’une infusion de ses feuilles ou de ses follicules mêlée à une décoction de fruits pectoraux, tels que les raisins, les dattes, & les figues, fournit un purgatif des plus benins. C’est comme un correctif de cette espece qu’on donne la manne avec le tartre émétique, dont elle affoiblit considérablement l’action dans la plûpart des cas, & dans le plus grand nombre des sujets.

Il ne seroit pas assez exact de regarder le sucre & le jaune d’œuf comme de simples correctifs des résines purgatives, parce que c’est par une véritable combinaison qu’ils châtrent l’activité de ces corps, qu’ils les dénaturent, qu’ils en font un être nouveau dans lequel on ne doit plus considérer ces principes de composition, de même qu’on ne s’avise pas d’avoir égard aux qualités particulieres de l’acide nitreux & de l’alkali fixe, lorsqu’il s’agit des vertus du nitre, &c. Voyez Résine & Purgatif.

Les qualités desagréables que nous cherchons à corriger dans les medicamens, sont la mauvaise odeur & le mauvais goût. La premiere correction est connue sous le nom d’aromatisation : elle consiste à ajoûter au medicament quelqu’eau, quelqu’esprit, ou quelque poudre aromatique, pour couvrir autant qu’il est possible, sa mauvaise odeur : sur quoi il faut se souvenir qu’il est certains malades à qui les odeurs douces peuvent être funestes, & qu’en général toutes les odeurs ne sont pas également agréables à tout le monde ; que l’ambre affecte bien diversement les différens sujets, &c.

La seconde de ces corrections s’effectue 1°. par l’édulcoration (Voyez Edulcoration) ; 2°. en enveloppant les remedes solides, comme boles, pilules, opiates, &c. dans différentes matieres qui les empê-

chent de faire aucune impression sur l’organe du

goût ; ces enveloppes les plus ordinaires sont le pain-à-chanter, les feuilles d’or ou d’argent, la poudre de réglisse, de sucre, &c. 3°. on corrige ou plûtôt on prévient le mauvais goût de certains remedes, par certaines circonstances de leur préparation ; c’est ainsi que la manne fondue à froid, ou à une très-legere chaleur, est bien moins desagréable que celle qu’on a fait fondre dans l’eau bouillante.

Une autre espece de correction pharmaceutique qui a été long-tems en usage, & que nous avons enfin abandonnée, étoit celle qui consistoit à faire macérer dans différentes liqueurs, & principalement dans le vinaigre, certaines drogues prétendues dangereuses, comme l’azarum, l’ésule, l’ellébore ; à en exposer d’autres, comme la scammonée, à la vapeur du soufre, &c. cette correction remplissoit fort mal sans doute la vûe qu’on se proposoit ; car elle affoiblissoit ou châtroit la vertu médicamenteuse, au lieu de l’épargner, comme on le prétendoit, en ne détruisant qu’une vertu vénéneuse supposée dans la drogue. Or comme cet affoiblissement est toûjours inexact ou impossible à évaluer avec quelque justesse, il est plus sûr d’avoir recours à des remedes qui possedent la même vertu en un degré moins actif, ou d’employer les premiers non-corrigés en moindre dose, que d’avoir recours à ces remedes ainsi corrigés, qui sont toûjours infideles.

La lotion de l’aloès que l’on faisoit aussi en vûe de le corriger, est une opération plus mal-entendue encore ; car par ce moyen on rejettoit les parties résineuses de l’aloès, pour ne conserver que ses parties extractives : or quand même la séparation de ces deux parties pourroit être regardée comme avantageuse, en ce qu’elle fourniroit deux différens remedes chacun très-utile, on ne pourroit jamais regarder cette séparation comme une correction. Mais il conste d’ailleurs par l’observation, que l’aloès entier fournit un fort bon remede à la Medecine ; au lieu que son extrait seul ne possede qu’en un degré très inférieur les vertus de l’aloès entier, tandis que sa résine est absolument inusitée. (b)

CORRECTION, s. f. (Gramm.) voyez l’article Correct.

Correction du Midi, en Astronomie : voici en quoi elle consiste. Les Astronomes, pour déterminer l’heure de midi, employent les observations qu’ils appellent de hauteurs correspondantes, c’est-à-dire qu’ils observent avant midi le soleil à une certaine hauteur, & qu’ils attendent ensuite l’heure où ils observeront le soleil à la même hauteur après midi. L’instant milieu entre les deux observations détermine l’instant du midi. Cette méthode est analogue à celle dont on se sert pour déterminer la ligne méridienne sur un plan horisontal, en marquant deux points où l’ombre du style soit égale avant & après midi, & prenant le milieu entre ces deux points. Voyez Ligne méridienne. Mais ces méthodes supposent que le soleil décrit chaque jour, par son mouvement apparent, un cercle exactement parallele à l’équateur ; ce qui n’est pas rigoureusement vrai : car comme l’écliptique est oblique à l’équateur, & que le soleil avance chaque jour par son mouvement apparent d’environ un degré sur l’écliptique, il a chaque jour un petit mouvement en déclinaison ; d’où il est aisé de voir que dans deux instans également éloignés de l’instant de midi, l’un avant, l’autre après, il ne doit pas être exactement à la même hauteur ; qu’ainsi après avoir observé le soleil à deux hauteurs égales, & pris le milieu du tems écoulé, on n’a pas encore le vrai instant du midi, & qu’il faut une petite correction. Plusieurs astronomes ont résolu ce problème par des méthodes fort simples ; entr’autres M. de Maupertuis, dans son astronomie nautique,