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* ENTACAGE, s. m. (Manuf. en velours.) c’est un assemblage de différentes baguettes, qui se place en une chanée ou logement pratiqué à l’ensuple de devant des métiers à velours.

Cette ensuple étoit, avant l’invention de cette machine ingénieuse, garnie de petites pointes qui passoient à-travers le velours, & qui le tenoient appliqué sur l’ensuple. On étoit obligé d’employer ces pointes aux velours, parce que si l’on eût enroulé cette étoffe sur elle-même, comme les autres, son poil se seroit écrasé, n’auroit pû se redresser, & l’étoffe eût été gâtée ; mais d’un autre côté les pointes l’érailloient, la cribloient de petits trous, & nuisoient beaucoup à sa qualité. Ce fut ce qui détermina un ouvrier à chercher un remede à ces inconvéniens ; & il trouva l’entacage, qui consiste à faire faire plusieurs tours au velours, sur des baguettes auxquelles son envers est toûjours appliqué, & contre lesquelles il est si fortement retenu par le seul frotement, qu’on déchireroit plûtôt l’étoffe que de l’en séparer. Entre ces baguettes il y en a à la vérité une de fer assez large, & dont la surface est toute hachée, afin d’augmenter le frotement par ces inégalités. On trouvera à l’article Velours une description plus détaillée de cette invention, & l’on en verra la figure & la coupe dans nos Planches de soierie. En attendant nous proposons à ceux qui voudront sentir tout le mérite de cette invention, de résoudre ce probleme de Méchanique : Substituer aux pointes de l’ensuple, une machine telle que l’étoffe soit tenue fortement & également tendue sur toute sa largeur, sans la percer de trous ni écraser son poil.

ENTAILLE, s. f. en Architecture ; c’est une ouverture qu’on fait pour joindre quelque chose avec une autre. Les entailles se font quarrément de la demi-épaisseur du bois, par embrévent à queue d’aronde, en adent, &c. ainsi que les assemblages. On fait des entailles dans les incrustations de pierre ou de marbre, pour y placer les morceaux postiches. On fait encore des entailles a queue d’aronde, pour mettre un tenon de nœud de bois de chêne, ou un crampon de fer ou de bronze incrusté de son épaisseur, pour retenir un fil dans un quartier de pierre, ou dans un bloc de marbre. (P)

Entailles, (Lutherie.) ce sont dans le sommier de l’orgue, ces vuides ou mortoises que l’on fait aux longs côtés du chassis, pour recevoir les barres qui forment les gravures. Voyez Sommier de grand Orgue.

Entailles, ce sont aussi les ouvertures que l’on fait derriere les tuyaux de montre, pour les amener à leur ton. Ce sont de grands trous a a b (figure 31. Planche d’Orgue), dont l’usage est de déterminer la longueur du tuyau, lorsqu’on l’a fait plus long qu’il ne faut pour remplir la face du fust d’orgue. L’entaille ou ouverture inférieure b, qui met le tuyau à son ton, a plusieurs fentes à sa partie inférieure, qui forment plusieurs lambeaux qu’on n’ôte pas tout-à-fait, & avec lesquels, comme avec les oreilles, on accorde les tuyaux. Voyez Oreilles.

ENTAILLOIRS droits & courbes, (Luth.) représentés fig. 9 & 9. n°. 2. Pl. X. de Lutherie-Musett. sont des outils ou especes de petites équoines dont les Facteurs de musettes se servent pour séparer en deux les éminences qu’ils ont réservées au-dehors des chalumeaux, pour servir de tenons aux clés. Voyez Musette, & la figure des chalumeaux, dans nos Planches de Lutherie.

ENTALINGUER, (Mar.) voyez Talinguer.

* ENTAMER, v. act. au physique, c’est séparer d’un corps qu’on considere comme un tout, une partie qu’on regarde comme la premiere, qu’on appelle l’entamure. Au figuré, il est synonyme à commencer ; ainsi entamer une négociation, c’est la commencer.

Entamer, (Manég.) terme que nous employons en divers sens.

Entamer un cheval, ou commencer à lui faire comprendre les premieres leçons du Manége, expressions synonymes : ce cheval n’est qu’entamé.

Entamer une volte, un changement de main, se dit pour désigner l’instant où l’on commence cette volte ou ce changement de main : Vous n’avez pas saisi les tems justes par lesquels vous deviez entamer votre changement de main.

Entamer se dit encore en parlant du terrein que l’animal embrasse, & de la jambe qui précede, ou qui est la premiere à l’embrasser. Au galop à droite la jambe de devant du hors-montoir, & au galop la jambe de devant du montoir, doivent entamer. Voy. Galop. C’est-à-dire qu’à l’un la jambe droite doit précéder la gauche, & qu’à l’autre la jambe gauche doit devancer la droite. (e)

ENTAMURE, s. f. (Chirurgie.) division de continuité qui se fait avec les instrumens tranchans, tant sur les parties dures que sur les parties molles.

Les anciens ont distingué cinq manieres de faire une entamure sur les parties dures ; savoir en troüant ou trépanant, en raclant, en sciant, en limant, & en coupant.

On troue ou on trépane avec un instrument tranchant en forme de scie ronde, appellée trépan. On racle avec un instrument nommé rugine ; cette opération emporte la superficie des os corrompus, ce qui rend plus prompt l’effet des remedes appliqués. On scie les os des membres qu’on doit amputer. On lime les dents pour les séparer, pour les rendre égales, & pour en emporter la carie. On coupe avec des tenailles incisives les extrémités des os cassés, dont les pointes peuvent piquer certaines parties. On coupe les os mêmes dans leur continuité, lorsqu’on ne peut les scier, ou les séparer dans leur contiguité. Voyez Trépan, Rugine, Scie, Lime & Tenailles incisives en Chirurgie.

Les anciens ont aussi distingué douze manieres de faire une entamure aux parties molles ; l’aplotomie, la phlébotomie, l’artériotomie, l’oncotomie, le catacasmos, le périérèse, l’hypospatisme, le périscithisme, l’encopé, l’acrotériasme, l’angéïotomie, & la lithotomie. La définition de tous ces mots, que nous allons ajoûter ici contre notre coûtume, ne tiendra guere plus d’espace que la désignation des renvois.

L’aplotomie est une simple ouverture faite à une partie molle ; la phlébotomie est l’ouverture d’une veine ; l’artériotomie, celle d’une artere ; & l’oncotomie, celle d’un abcès. Le catacasmos est ce qu’on appelle en françois scarification : il y en a de trois sortes ; savoir, la moucheture, qui ne va pas au-delà de la peau ; l’incision, qui pénetre jusqu’aux muscles ; & la taillade, qui va jusqu’aux os. La périerèse est une espece d’incision que les anciens faisoient autour des grands abcès ; l’hypospatisme est une incision qu’ils pratiquoient au-devant de la tête, & qui pénétroit jusqu’à l’os ; le périscithisme est une incision circulaire qu’ils continuoient depuis une tempe jusqu’à l’autre, & qui pénétroit jusqu’à l’os. La cruauté de ces trois especes d’opérations, & leur peu de succès, les ont proscrites. L’encopé est l’amputation d’une petite partie, par exemple, d’un doigt ; l’acrotériasme est l’amputation d’un membre considérable, par exemple d’une jambe ; l’angéïotomie est l’ouverture d’un vaisseau ; la lithotomie est une ouverture qu’on fait à la vessie pour en tirer une pierre. Principes de Chirurgie. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Entamure, en Architecture : ce mot se dit des premieres pierres d’une carriere nouvellement découverte. (P)