dans un livre l’ordre de la nature & les nuances de ses productions ; en les distribuant dans un cabinet, on prétend suivre cet ordre, & se conformer au système naturel ; on se croit arrivé au plus haut point de perfection ; & en effet on y seroit parvenu, si ce système étoit vraiment conforme à celui de la nature. Je ne sais si l’esprit humain est capable d’une telle découverte, au moins elle paroît encore bien éloignée. On n’a fait jusqu’à présent qu’une très petite partie des observations qui doivent la précéder ; on s’est contenté de combiner les caracteres tirés des différences & des ressemblances qui se trouvent entre des productions de la nature considérées dans une seule de leurs parties constituantes ou de leurs propriétés, & on a fait en conséquence des divisions & des distributions méthodiques de toutes les productions de la nature, tandis qu’il faudroit observer chacun de ces êtres en entier & dans chacune de ses parties, les comparer entr’eux à tous égards, & faire toute la suite de combinaisons nécessaires pour avoir des résultats généraux qui embrasseroient & qui manifesteroient l’ordre de la nature. Voyez Méthode.
Toute division méthodique, qui n’est fondée que sur des résultats particuliers, est donc fautive, & peut être démentie par de nouvelles combinaisons plus étendues & par des résultats plus généraux. On ne peut pas trop s’en défier dans l’étude de l’Histoire naturelle, soit à la lecture des livres, soit à la vue des cabinets ; ils ne nous présentent qu’un tableau mal composé, puisque les objets de la nature y sont mal distribués. Cependant c’est déja un grand avantage de voir ces objets rassemblés ; & leur distribution, quoique mauvaise au fond, tient à des combinaisons & à des résultats qui apprennent les rapports que quelques parties de certaines productions de la nature ont entr’elles. D’ailleurs, ces divisions méthodiques soulagent la mémoire, & semblent débrouiller le cahos que forment les objets de la nature, lorsqu’on les regarde confusément ; mais il ne faut jamais oublier que ces systèmes ne sont fondés que sur les conventions arbitraires des hommes ; qu’ils ne sont pas d’accord avec les lois invariables de la nature. Si on les suivoit avec une confiance aveugle, ils induiroient en erreur à chaque pas ; ils ne sont que des guides infideles, dont on doit s’écarter dès que l’on a acquis assez de lumieres pour se conduire soi-même.
Histoire des Maladies, (Medecine.) c’est la partie la plus importante de la doctrine de la Medecine, qui consiste dans la description de tous les symptomes évidens, essentiels, qui ont précédé, qui accompagnent & qui suivent chaque espece de maladie, observés exactement dans l’individu qui en est affecté.
Cette description doit aussi renfermer tout ce qui a rapport à l’état du malade, comparé avec son âge, son sexe, son tempérament, celui de ses parens, la saison de l’année, la température de l’air, la nature du climat où il vit ; celle des alimens, des eaux, dont il use habituellement, de la situation particuliere du lieu qu’il habite, & des maladies qui y régnent.
Ce n’est que sur une semblable exposition bien exacte que peut être fondée la science expérimentale du medecin. Ce n’est que par la connoissance de toutes ces circonstances qu’il parvient à bien distinguer une maladie d’avec une autre ; à se mettre au fait de la marche de la nature dans le cours des différentes maladies ; à former des raisonnemens pour parvenir à bien connoître leurs causes ; à tirer de ces différentes connoissances, les indices qui servent à l’éclairer dans le jugement qu’il peut porter de l’évenement qui terminera la maladie ; à en déduire
les indications qu’il doit remplir pour son traitement, afin d’en procurer aussi promptement, aussi sûrement, & avec aussi peu de desagrément qu’il est possible, la guérison desirée, si le cas en est susceptible ; ou de n’entreprendre qu’une cure palliative, si on peut en espérer quelque avantage, & qu’elle soit plus convenable que de s’abstenir absolument de tous remedes de conséquence, ainsi qu’il est souvent très-prudent de le faire.
En effet, on doit déclarer la maladie incurable, dès qu’on est bien fondé à la regarder comme telle, & se borner à conserver la vie, lorsqu’on ne peut pas rétablir la santé, & à procurer du soulagement, en attendant que la mort fournisse le moyen (que l’on doit saisir autant qu’il est possible, pour rendre complette l’histoire des maladies qui en sont susceptibles) de comparer par l’inspection anatomique des cadavres, les effets apparens de la maladie avec ceux qu’elle a produits dans la disposition des organes cachés, d’où on puisse tirer de nouvelles connoissances qui établissent des signes diagnostics, prognostics, indicans, que l’on n’avoit pas, ou que l’on ne connoissoit qu’imparfaitement avant ces recherches, relativement au cas dont il s’agit.
Ce ne peut être qu’en suivant ce plan d’après Hippocrate, & les seuls vrais maîtres de l’art qui ont marché sur ses traces, que les Medecins peuvent se flater de travailler d’une maniere véritablement utile à l’avancement de l’art de guérir, de parvenir à se procurer des succès distingués & mérités dans l’exercice de leur profession, & de se rendre recommandables à la postérité, en l’enrichissant du recueil de leurs observations. Voyez Maladie, Cure, Medecine, Observation.
* HISTORIOGRAPHE, s. m. (Gramm. & Hist. mod.) celui qui écrit ou qui a écrit l’Histoire. Ce mot a été fait pour désigner cette classe particuliere d’auteurs ; mais on l’emploie plus communément comme le titre d’un homme qui a mérité par son talent, son intégrité & son jugement, le choix du gouvernement pour transmettre à la postérité les grands évenemens du regne présent. Boileau & Racine furent nommés historiographes sous Louis XIV. M. de Voltaire leur a succédé à cette importante fonction sous le regne de Louis XV. Cet homme extraordinaire, appellé à la cour d’un prince étranger, a laissé cette place vacante, qu’on a accordée à M. Duclos, secrétaire de l’académie Françoise. Racine & Boileau n’ont rien fait. M. de Voltaire a écrit l’histoire du siecle de Louis XV. Je ne doute point que M. Duclos ne laisse à la postérité des mémoires dignes des choses extraordinaires qui se sont passées de son tems.
* HISTORIQUE, adj. (Gramm.) qui appartient à l’Histoire. Il s’oppose à fabuleux. On dit les tems historiques, les tems fabuleux. On dit encore un ouvrage historique ; la peinture historique est celle qui représente un fait réel, une action prise de l’Histoire, ou même plus généralement une action qui se passe entre des hommes ; que cette action soit réelle, ou qu’elle soit d’imagination, il n’importe. Ici le mot historique distingue une classe de peintre & un genre de peinture.
HISTRION, s. m. (Hist. rom.) farceur, baladin d’Etrurie. On fit venir à Rome des histrions de ce pays-là vers l’an 391 pour les jeux scéniques ; Tite-Live nous l’apprend, dec. I. liv. VII.
Les Romains ne connoissoient que les jeux du cirque, quand on institua ceux du théatre, où des baladins, qu’on appella d’Etrurie, danserent avec assez de gravité, à la mode de leurs pays & au son de la flûte sur un simple échafaud de planches. On nomma ces acteurs histrions, parce qu’en langue tos-