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quelques-uns des honoraires, ont la délicatesse de vouloir être distingués de ceux-ci, & la modestie de ne se pas compter parmi les autres ; ils recherchent les places d’académiciens libres. Il y a apparence que cette classe absorbera insensiblement celle des honoraires. Fontenelle, qui entendoit mieux que personne les véritables intérêts de sa gloire, répondit au duc d’Orléans régent, qui lui offroit de le faire président perpétuel de l’académie des Sciences : eh, monseigneur, pourquoi voulez-vous m’empêcher de vivre avec mes pareils ?

Il n’y a point d’honoraires dans l’académie françoise ; il paroît même qu’elle ne reconnoît pas pour être de la langue l’acception dont il s’agit ici, car on ne la trouve pas dans son dictionnaire. Quelques membres de cette compagnie firent autrefois une tentative pour y introduire une classe d’honoraires. Il falloit qu’ils ne fussent pas trop faits pour ce titre, puisqu’ils en avoient tant de besoin, & ils ne méritoient pas davantage celui d’académicien, puisqu’il ne leur suffisoit pas. Le marquis & l’abbé de Dangeau qui, à tous égards, ne pouvoient pas éviter d’être honoraires, si l’on en faisoit, eurent assez d’amour propre pour s’y opposer. Ils s’adresserent directement au Roi, qui approuva leurs raisons, & rejetta ce projet. Si l’on continue l’histoire de l’académie, ce fait n’y sera vraissemblablement pas oublié. La personne qui par sa naissance & par ses sentimens s’intéressoit le plus à la mémoire de MM. de Dangeau, m’a demandé de faire mention de leur procédé pour l’académie, si j’en avois occasion ; je m’acquitte ici de la parole que j’ai donnée. Charlemagne, ayant formé dans son palais une société littéraire, dont il étoit membre, voulut que dans les assemblées chacun prît un nom académique, & lui-même en adopta un, pour faire disparoître tous les titres étrangers. Charles IX. qui forma aussi une académie, dit dans les lettres patentes, à ce que ladite académie soit suivie & honorée des plus grands, nous avons libéralement accepté & acceptons le surnom de protecteur & premier auditeur d’icelle. Cet article est de M. Duclos, secrétaire de l’académie françoise.

Honoraire, (Jurisprud.) en matiere de dignités & de fonctions, a deux significations différentes.

Il y a des honoraires ou ad honores, c’est-à-dire, qui ne remplissent pas toutes les fonctions, comme des conseillers honoraires, des tuteurs honoraires. Voyez Conseillers & Tuteurs.

Il y a aussi des honoraires, c’est-à-dire, des officiers qui ont obtenu des lettres d’honneur pour conserver le titre & les honneurs de leur place, quoiqu’ils se démettent de leur office : on n’accorde communément ces lettres qu’au bout de vingt ans ; cependant quelquefois, en considération des services & du mérite personnel de l’officier, on en accorde au bout d’un moindre tems.

Les honoraires conservent leur rang ordinaire, excepté les chefs de compagnie, qui ne peuvent prendre que la seconde place. Ils n’ont point de part aux émolumens. (A)

* HONORER, v. act. (Gramm.) donner des marques de soûmission, de respect, de vénération, & d’estime. On honore la mémoire des grands hommes par des éloges, par des monumens, & des cérémonies civiles. Un des préceptes du Décalogue promet une longue vie dans ce monde, à celui qui honorera son pere & sa mere. Les dieux ne veulent point être honorés par la cruauté, dit M. de Fenelon.

Honorer, en termes de Commerce de lettres de change, se dit de l’acceptation & du payement qu’on en fait par considération pour le tireur, quoiqu’il n’en ait point encore remis les fonds. S’il vous revient quelqu’une de mes lettres de change prote-

stées, je vous prie de les honorer, c’est-à-dire de

les accepter. Dictionn. de Commerce. (G)

HONORIADE, sub. fém. (Géog. anc.) contrée de l’Asie mineure ; elle fit long-tems partie de la Bithynie, & n’étoit pas une province particuliere avant l’empire d’Honorius, successeur du vieux Théodose ; mais dans la suite elle devint la onzieme partie du royaume du Pont, que les Romains avoient réduit en province ; il en est parlé beaucoup dans les novelles & dans les conciles. (D. J.)

HONORIAQUE, s. m. Honoriaci, (Hist. anc.) nom d’une espece de milice ancienne qui introduisit les Vandales, les Alains, les Sueves, &c. en Espagne.

Didyme & Vérinien, deux freres, avoient défendu à leurs propres frais, & avec beaucoup de valeur & de vigilance, les passages des Pyrénées contre ces barbares ; mais ayant été tués, l’empereur Constantius mit en garnison dans ces passages les Honoriaques, qui non-contens de les ouvrir à toutes ces nations du Nord, qui ravageoient les Gaules, se joignirent à eux. Dict. de Trévoux. (G)

HONORIFIQUES (droits) Jurisprud. nous avons donné ci-devant les notions générales de cette matiere au mot Droits honorifiques ; nous ajoûterons seulement ici par forme de supplément & d’explication sur ce qui est dit, qu’en Bretagne le patron jouit seul des droits honorifiques, & que le seigneur haut-justicier n’y participe pas. Je l’ai avancé d’après le sentiment de M. Guyot, qui dans ses observations sur les droits honorifiques, a fait une dissertation à ce sujet, fondée sur l’ordonnance de 1539, donnée pour la Bretagne. Mais voici le vrai sens de cette loi, suivant l’usage constant du Parlement de Bretagne, ainsi que me l’a observé M. du Parc Poulain.

Des gentilshommes prétendoient en Bretagne avoir non-seulement les moindres honneurs de l’Eglise, mais aussi les droits honorifiques, proprement dits ; à l’égard des moindres honneurs, l’ordonnance y est formellement contraire, sauf néanmoins la modification qui y fut apportée par une déclaration du Roi, du 24 Septembre de la même année, qui conserve les possessions passées, & qui borne l’exécution de l’ordonnance à l’avenir.

A l’égard des grands honneurs de l’Eglise, qui sont les seuls droits honorifiques proprement dits, l’ordonnance de 1539, ne dit rien de ceux qui sont seigneurs de l’Eglise ; elle veut que ceux qui prétendent être patrons ou fondateurs, le prouvent par titres.

Mais 1°. s’il n’y a pas de fondateur, le seigneur est réputé le fondateur, parce qu’il est réputé avoir donné le fonds pour le bâtiment de l’église ; ainsi en prouvant que l’église est bâtie dans son fief, il satisfait pleinement à l’ordonnance de 1539, parce qu’en produisant le titre de sa féodalité sur l’église, il produit un titre suffisant pour établir présomptivement sa qualité de fondateur.

2°. S’il y a un patron & fondateur qui ne soit pas seigneur de l’église, il a les premiers honneurs, & le seigneur de l’église les a après lui, comme un honneur dû à la féodalité, auquel on pense que l’ordonnance de 1539, n’a point eu intention de donner atteinte. Cela a toûjours été ainsi décidé pendant que la réformation du domaine a duré ; & c’est une maxime constante en Bretagne ; c’est même une opinion assez commune dans cette province, à ce que m’assûre M. du Parc Poulain, mais qui souffre cependant des difficultés, qu’en Bretagne, lorsqu’il n’y a pas de fondateur, le seigneur du fief de l’église a tous les honneurs, quoiqu’il ne soit pas haut-justicier ; M. du Parc dit qu’il a eu plusieurs fois occasion d’attaquer cette derniere proposition dans