Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/311

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orné de douze statues colossales qui représentaient quelques-uns des héros de l’histoire de France ; mais elles chargeaient trop les piles sur lesquelles elles étaient placées : on craignit un tassement qui aurait pu avoir de graves conséquences, et en 1837 on transporta ces lourds grands hommes dans la cour d’honneur du château de Versailles[1].

Tels sont les dix ponts que le dix-neuvième siècle a trouvés à Paris et qui alors suffisaient aux exigences de la grande ville. Napoléon, la dynastie de Juillet et le second empire ont singulièrement augmenté ce nombre ; Paris compte aujourd’hui vingt-six ponts et même vingt-sept, si l’on compte le pont Saint-Charles, qui sert aux communications des deux rives de l’Hôtel-Dieu. Sous le gouvernement de Louis-Philippe, la mode était aux ponts suspendus ; on en fit beaucoup trop ; outre le très-grave inconvénient qu’ils ont de ne point offrir de passage aux voitures, ils ont prouvé, par l’usage, qu’ils étaient peu solides et résistaient mal au piétinement perpétuel d’une population toujours active et pressée[2]. De toutes les passerelles qui ont été élevées, il y a une trentaine d’années, une seule subsiste encore aujourd’hui : c’est la passerelle de Constantine, qui, livrée au

  1. Ces statues sont celles de Sully, Suger, Du Guesclin, Colbert, Turenne, Duguay-Trouin, Suffren, Bayard, Condé, Duquesne, Tourville et le cardinal de Richelieu. C’est une ordonnance de Louis XVIII, datée des 19 janvier et 14 février 1816, qui en fixa le choix ; mais ce choix remplaçait celui qui avait été fait par Napoléon six ans auparavant. « Le 1er janvier 1810, etc., avons décrété et décrétons ce qui suit : Les statues des généraux Saint-Hilaire, Espagne, Lassalle, Lapisse, Cervoni, Lacour, Hervé, morts au champ d’honneur, seront placés sur le pont de la Concorde. » Il faut reconnaître que le projet de Louis XVIII est plus général dans son ensemble et historiquement meilleur que celui de Napoléon.
  2. Ils peuvent être excessivement dangereux. Qu’on se rappelle la catastrophe d’Angers : le 16 avril 1850, un bataillon du 11e léger s’engagea sur un pont suspendu et négligea de rompre le pas ; sous ce poids cadencé, les amarres se brisèrent, tout le détachement fut précipité et 223 hommes furent noyés.