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Page:Du Camp - Paris, tome 2.djvu/234

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pour triompher théoriquement et s’imposer peu à peu à la nation tout entière. Bien des rois de France, pressés par des besoins urgents, ont altéré les monnaies, fixant d’une façon arbitraire le taux du marc d’or et du marc d’argent, et réalisant ainsi des bénéfices considérables au détriment de leurs sujets. Les premiers Valois ont emporté dans l’histoire le triste surnom de faux-monnayeurs, et les peuples leur ont souvent redemandé en vain « la forte monnoye du bon roy sainct Louys ». Soit qu’ils voulussent gagner sur la monnaie, soit qu’ils voulussent au contraire lui assurer un titre et un poids réguliers, les rois ont toujours eu intérêt à faire surveiller de près la fabrication des espèces métalliques ; aussi tous les gouvernements l’ont-ils soumise à un contrôle très-étroit[1].

Dans les premiers temps de la monarchie, la monnoye se fabrique au palais même, et, pendant leurs voyages, les rois emmènent les monnayeurs avec eux. Plus tard, les ateliers furent situés au Marais, sur l’emplacement qu’occupe probablement aujourd’hui la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie ; Henri II les fit installer au logis des Étuves, sorte de palais qu’il possédait dans la Cité sur les anciens jardins de Philippe le Bel, à l’endroit où s’étend de nos jours la place Dauphine ; mais cet établissement fut dès 1585 presque exclusivement consacré aux médailles, et la monnaie du roi resta, jusqu’au siècle dernier, entre la rue de la Monnaie et la rue Thibautodé, non loin des greniers à sel.

  1. La monnaie n’a pas toujours été exclusivement en métal ; dans les possessions portugaises d’Angola, on se servait, avant 1694, d’une monnaie de paille tressée à laquelle les habitants étaient si fort accoutumés, qu’ils se révoltèrent lorsqu’on leur imposa des pièces de bronze ; en 1833, au Chili, dans la ville de Valdivia, on usait d’une monnaie composée de rondelles de cuir frappées d’une empreinte ; aujourd’hui encore, la monnaie métallique est inconnue aux nègres du continent africain, qui la remplacent par les rassades et surtout par les cauris (Cyprea moneta).