Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/166

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n’aura d’autre importance que celle qu’on lui accordera ; il prendra fin tout naturellement si l’on n’y fait pas attention. Il ne date pas d’hier : déjà, à la fin du second Empire, on faisait acte d’opposition au gouvernement en éloignant le prêtre des aborda d’une tombe ; déjà cela s’appelait « un enterrement civil ». On prononçait de violents discours, et comme bien souvent les assistants avaient fait au mort des libations intérieures, la parole trahissait la pensée des orateurs. Au mois de septembre 1869, sur la tombe d’un libre penseur, il a été donné la leçon d’histoire que voici : « Notre ami avait été capitaine de la garde nationale, il refusa cependant de dîner chez Louis-Philippe, car il eût été obligé de se courber devant un tyran ; cet acte si naturel à une âme généreuse le fît condamner à cinq ans d’exil et à la surveillance à vie. » Les enterrements exclusivement civils sont actuellement dans la proportion de 4 à 5 pour 100, ce qui ne semble pas excessif lorsque l’on se rappelle la propagande qui a été entreprise à cet égard. Quel emblème place-t-on sur la tombe d’un libre penseur pour la reconnaître ? Invariablement une croix.

Bien souvent on voudrait se rattraper sur l’épitaphe et en faire une déclaration de principes ; mais cela n’est pas facile. L’ordonnance de 1843 est péremptoire : toute inscription est soumise au visa de l’autorité municipale. Au premier abord cela paraît excessif, et l’on doit croire que chacun a le droit d’honorer à sa guise la mémoire des morts. C’est là une opinion dont on revient promptement lorsque l’on a eu entre les mains la copie des épitaphes refusées. Il est impossible de se figurer un tel ramassis de niaiseries et de sottises. Je laisse de côté celles qui cachent un sens répréhensible au point de vue moral. À ne s’occuper que des phrases qui donneraient à rire au public dans un lieu consacré