Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/284

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rent rarement dénoncés. Bien plus, au moment où l’on ne savait qu’inventer pour faire acte de croyance nouvelle et se rejeter hors de la foi des ancêtres, la tradition catholique dont nous sommes pénétrés jusque dans nos moelles, se faisait jour et désespérait ceux qui avaient rêvé d’installer le culte abstrait de la raison. Des rapports de police secrète en donnent des preuves qu’il faut citer : « 21 mai 1793. Ce qu’il y a de plaisant, c’est de voir le même peuple qui persécute les prêtres, profane les temples, se joue de la religion, de le voir, dis-je, regarder la Pentecôte comme un jour de solennité. » — « 28 juillet 1793. Aux portes de Paris, à Nanterre, le fanatisme et la superstition sont encore si grands que, pour obtenir promptement la fin de la guerre, on a comblé la Vierge de présents ; elle est chargée de rubans tricolores pour plus de 1 200 livres. » — Aussi les efforts de la loi échouèrent, car toute loi est impuissante » lorsqu’elle est en contradiction avec les mœurs.

On eut beau instituer le repos du décadi, on n’en chômait pas moins le dimanche. La Convention décréta des fêtes officielles : fondation de la République, 1er  vendémiaire ; fête de la Jeunesse, 10 germinal ; fête des Époux, 10 floréal ; de la Reconnaissance, 10 prairial ; de l’Agriculture, 10 messidor ; de la Liberté, 9 et 10 thermidor ; l’habitant de Paris n’en garda pas moins ses vieilles coutumes et continua à célébrer, par la cessation de tout travail, les fêtes de l’Église. Par curiosité, par cet esprit de badauderie qui l’entraîne invinciblement vers toute nouveauté, et non par conviction, comme l’on essayait de se le persuader, il a donné dans toutes les niaiseries qu’on lui offrait en appât. Le 20 prairial, deux jours avant le vote de la loi la plus cruelle qui fut jamais, il admira la fête de l’Être-Suprême qu’avait dessinée David, « le Raphaël des sans-