par la Défense nationale avait eus sur la population urbaine, reconnaissant que ces résultats avaient été singulièrement aggravés par l’orgie permanente qui avait régné pendant les deux mois de la Commune, voulut réagir avec violence, arracher Paris à l’alcoolisme envahissant et diminuer, autant que possible, la consommation des liqueurs fortes. Agissant comme pouvoir législatif et comme société de tempérance, elle a frappé les alcools d’un impôt qui en représente quatre fois la valeur, soit 400 pour 100. Ainsi un hectolitre d’alcool qui, pris en fabrique, coûte 80 ou 85 francs, ne franchit la barrière qu’après avoir acquitté le droit du trésor, qui est de 199 francs, la taxe d’octroi qui est de 66 francs 50 cent., plus le double décime et le demi-décime ; il paye au total 328 francs 55 cent. Certes un tel impôt est léonin, et l’on pourrait croire que l’industrie qu’il atteint en reste anéantie à jamais ; erreur ! Il faut aller au fond des choses, cela en vaut la peine.
Ce que l’Assemblée nationale a surtout visé, c’est l’absinthe. Or voici un calcul puisé aux sources les plus sûres : l’hectolitre d’absinthe acheté en province coûte 105 francs, le transport jusqu’à Paris 5 francs, le droit 328 francs 55 cent. : total, 438 francs 55 cent. ; ce qui met le litre à 4 francs 40 cent., chiffre rond, entre les mains du marchand en gros, qui le revend 6 francs au marchand en détail. Un litre mesuré à l’éprouvette contient précisément 47 petits verres. Dans les cabarets, le petit verre d’absinthe coûte 4 sous ; dans les cafés élégants du boulevard, 8 sous ; donc le litre est vendu 9 francs 40 cent, par les uns, 18 francs 80 cent, par les autres : 50 pour 100 de bénéfice aux premiers, 200 pour 100 aux seconds. Le bourgeois gentilhomme méprisait le commerce, il avait tort. Il y a aujourd’hui à Paris vingt-cinq mille établissements où l’on débite de l’absinthe ; on y en boit au moins un demi-litre par jour,