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LES THÉORIES REPRÉSENTATIVES ET L’HISTOIRE

certains passages de ses De revolutionibus cœlestibus libri sex, il professe, au sujet de la réalité de ses hypothèses, une opinion moins réservée que la doctrine héritée de la Scolastique et exposée dans le Commentariolus.

Cette dernière doctrine est formellement énoncée dans la célèbre préface qu’Osiander écrivit pour le livre : De revolutionibus cœlestibus libri sex ; ainsi s’exprime Osiander : Neque enim necesse est eas hypotheses esse veras, imo, ne verisimiles quidem ; sed sufficit hoc unum, si calculum observationibus congruentem exhibeant. Et il termine sa préface par ces mots : Neque quisquam, quod ad hypotheses attinet, quicquam certi ab astronomia expectet, cum nihil tale praestare queat.

Une telle doctrine au sujet des hypothèses astronomiques indignait Képler[1] : « Jamais, dit-il dans son plus ancien écrit[2], je n’ai pu donner mon assentiment à l’avis de ces gens qui vous citent l’exemple de quelque démonstration accidentelle où, de prémisses fausses, un syllogisme rigoureux tire quelque conclusion vraie, et qui, forts de cet exemple, s’efforcent de prouver que les hypothèses admises par Coper-

  1. En 1597, Nicolas Raimarus Ursus publia à Prague un écrit intitulé : De hypothesibus astronomicis, où il soutenait, en les exagérant, les opinions d’Osiander ; trois ans plus tard, donc en 1600 ou 1601, Képler répond par l’écrit suivant : Joannis Kepleri apologia Tychonis contra Nicolaum Raymarum Ursum ; cet écrit, demeuré en manuscrit et fort incomplet, fut publié seulement en 1858 par Frisch. (Joannis Kepleri astronomi Opera omnia, t. I, p. 215, Francfort-sur-le-Mein et Erlangen.) Cet ouvrage contient de vives réfutations des idées d’Osiander.
  2. Prodromus dissertationum cosmographicarum, continens mysterium cosmographicum… a M. Joanne Keplero Wintembergio, Tubingae, Georgius Gruppenbachius, MDXCVI ; — Joannis Kepleri astronomi Opera omnia, t. I, p. 112-153.