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les théories représentatives et l’histoire

géométriquement devint pour lui un phénomène expliqué ; ainsi cet illustre rival de M. Descartes eut bientôt la satisfaction singulière de se trouver grand philosophe par cela seul qu’il était grand géomètre. »

« …Je reviens donc[1] à ce que j’ai d’abord avancé, et je conclus qu’en suivant la méthode de ce grand géomètre, rien n’est plus facile que de développer le mécanisme de la nature. Voulez-vous rendre raison d’un phénomène compliqué ? Exposez-le géométriquement, vous aurez tout fait ; ce qui pourra rester d’embarrassant pour le physicien dépendra, à coup sûr, ou d’une loi primordiale, ou de quelque détermination particulière. »

Les disciples de Newton ne s’en tinrent d’ailleurs pas tous à la prudente réserve de leur maître ; plusieurs ne purent demeurer dans les étroites frontières que leur assignait sa méthode de Physique ; franchissant ces limites, ils affirmèrent, en métaphysiciens, que les attractions mutuelles étaient des qualités réelles et premières de la matière et qu’un phénomène réduit à ces attractions était vraiment un phénomène expliqué. Tel fut l’avis émis par Roger Cotes dans la préface célèbre qu’il écrivit en tête de la seconde édition des Principia de Newton ; telle fut aussi la doctrine développée par Boscovich, qu’inspirait souvent la métaphysique leibnitzienne.

Toutefois, plusieurs des continuateurs de Newton, et non des moins illustres, s’en tinrent à la méthode qu’avait si bien définie leur illustre devancier.

Laplace professe la plus entière confiance en la puis-

  1. De Gamaches : Loc. cit., p. 81.