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Page:Dumarsais - Œuvres, t3, 1797.djvu/147

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DE DU MARSAIS.

L’allégorie est fort en usage dans les proverbes. Les proverbes allégoriques ont d’abord un sens propre qui est vrai, mais qui n’est pas ce qu’on veut principalement faire entendre : on dit familièrement, tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se brise ; c’est-à-dire, que, quand on afronte trop souvent les dangers, à la fin on y périt ; ou que quand on s’expose fréquenment aux ocasions de pécher, ou finit par y succomber.

Les fictions que l’on débite come des histoires pour en tirer quelque moralité, sont des allégories qu’on apèle apologues, paraboles, ou fables morales ; telles sont les fables d’Esope. Ce fut par un apologue que Ménénius Agrippa rapela autrefois la populace romaine, qui, mécontente du sénat, s’étoit retirée sur une montagne. Ce que ni l’autorité des lois, ni la dignité des magistrats romains n’avoient pu faire, se fit par les charmes de l’apologue.

Souvent les anciens ont expliqué, par une histoire fabuleuse, les éfets naturels dont ils ignoroient les causes, et dans la suite on a doné des sens allégoriques à ces histoires.

Boileau, Art. Poët. chant. iii.


Ce n’est plus la vapeur qui produit le tonerre,
C’est Jupiter armé pour éfrayer la terre ;
Un orage terrible aux yeux des matelots,
C’est Neptune en courroux qui gourmande les flots ;
Echo n’est plus un son qui dans l’air retentisse,
C’est une nymphe en pleurs qui se plaint de Narcisse.


Cette manière de philosopher flate l’imagination ; elle amuse le peuple, qui aime le merveilleux ; et elle est bien plus facile que les recherches exactes que l’esprit méthodique a introduites dans ces derniers tems. Les ama-