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l’avant, était mobile dans le sens de son axe, pour servir de gouvernail. Les deux hélices devaient être immergées au-dessous de la ligne de flottaison, et mises en mouvement par une machine à vapeur à deux cylindres.

La figure 110, empruntée au mémoire publié par M. Chopin-Dallery, représente le système moteur de ce bateau. A est la chaudière à la Perkins, qui sert à produire la vapeur ; B, le cylindre à vapeur, parcouru par le piston ; C, la tige du piston ; DD, la chaîne qui se replie sur une poulie, et vient, au moyen d’une roue à rochets E, faire tourner l’hélice F, ou plutôt l’escargot, comme l’appelle l’inventeur.

Ch. Dallery décrivait ainsi cet appareil dans son brevet, dont M. Chopin-Dallery a publié, depuis, le texte.

« L’aviron est remplacé, aux approches de la mer, par un arbre tournant posé dans la cale du vaisseau, à trois pieds au-dessous du niveau de l’eau. Cet arbre est mû par l’effet de deux rochets posés sur lui-même, qui reçoivent leur force des pistons, et de cet effet résulte un mouvement continu de rotation. L’arbre tournant est de fer, à pivots, sur deux coussinets. Il fait sur l’arrière du vaisseau une saillie de deux pieds. À cet arbre en est adapté un autre de bois, de six pieds de long ; ce dernier est garni de feuilles de cuivre un peu bombées, qui forment l’escargot. Leur diamètre est de six pieds et leur plan incliné (pas de vis) de trois pieds de pourtour. »

Ce mécanisme était placé à l’arrière du navire, pour produire l’action motrice. À l’avant, une autre hélice, G, mobile de droite à gauche, devait servir de gouvernail.

Mais faisons tout de suite remarquer que les dispositions mécaniques adoptées par l’auteur de ce projet, pour transmettre aux hélices les mouvements des deux pistons de la machine à vapeur, étaient trop défectueuses pour que l’exécution pût répondre à ses espérances. Comme on vient de le voir, Dallery propose, dans son brevet, de transmettre ce mouvement à l’aide de cordes et de poulies. C’était se faire une idée bien inexacte des résistances à vaincre et de la manière de combattre ces résistances[1].

Fig. 111. — Charles Dallery.

Disons en outre, que cet escargot composé d’une simple barre de bois environnée de feuilles de cuivre, est bien loin de l’idée que nous nous faisons d’une hélice. En fait d’hé-

  1. Il est difficile aujourd’hui de connaître exactement les détails du plan de Dallery. Le brevet d’invention qui lui fut accordé le 29 mars 1803, se trouve mentionné dans le IIe volume, p. 206, no 138 de la Collection des brevets d’Invention, publiée en 1818, par ordre du ministre de l’intérieur ; mais on se borne à rapporter le titre du brevet. Ce titre est le suivant :

    Mobile perfectionné appliqué aux voies de transport par terre et par mer. Ce n’est que de nos jours que le texte de ce brevet a été connu comme nous l’avons déjà dit, par la publication qu’en a faite M. Chopin-Dallery, gendre de l’inventeur.

    Si l’on cherche l’explication de ce laconisme dans la citation du recueil officiel, on la trouve dans une note placée en tête de l’ouvrage. Voici cette note :

    « Nous n’avons fait qu’indiquer, dans ce recueil, le titre des brevets dont l’objet est une conception chimérique que l’expérience a jugée, ou une chose que tout le monde connaît, ou que personne n’a envie de connaître. »

    Le projet de Dallery a donc été jugé avec défaveur à l’époque où il s’est produit. On ne peut s’empêcher de reconnaître que cette défaveur était justifiée sur plus d’un point. Mais il ne faut pas oublier, d’un autre côté, que ce projet a été conçu en 1803, c’est-à-dire à une époque où la navigation par la vapeur en était à peine à ses débuts. La pratique aurait sans doute amené l’auteur à faire disparaître les défectuosités de son système.