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« Tout étant prêt, vers six heures du soir, la machine à vapeur de Dalkey mit en mouvement la pompe pneumatique. Elle marcha si bien, qu’en une demi-minute le vide fut obtenu dans le tube. Les signaux nécessaires furent faits ; le train partit, et quatre minutes après il avait atteint Dalkey. On ne peut se faire une idée de la facilité avec laquelle marche la machine, même au milieu des courbes les plus roides que l’on trouve sur cette ligne. Le train glisse sur les rails presque sans qu’on s’en aperçoive ; point de fumée, point de bruit comme dans les chemins de fer à vapeur. Les mécaniques pour modérer le mouvement sont suffisantes ; on a arrêté à Dalkey avec la plus grande facilité. Le succès complet de cette expérience prouve que désormais la pression de l’air atmosphérique peut être appliquée aux chemins de fer. »

Les expériences subséquentes ayant confirmé ces premiers faits, le chemin de fer atmosphérique commença son service public de Kingstown à Dalkey.

Les résultats obtenus en Irlande frappèrent beaucoup l’attention. L’Angleterre et la France s’en émurent particulièrement. Deux années après, une compagnie anglaise décidait l’établissement d’un railway atmosphérique, de Londres à Croydon. Ce chemin atmosphérique, dont l’exécution rencontra beaucoup de difficultés, offrait une particularité intéressante. Entre Norwood et Croydon, il traversait, sur un viaduc gigantesque, les deux voies des chemins de fer ordinaires de Brighton et de Douvres.

C’est sous l’influence de ces faits que, pendant l’année 1844, le ministre des travaux publics en France, désireux de s’éclairer sur la valeur positive de ces nouveaux procédés, et de reconnaître leur influence sur l’avenir de nos chemins de fer, envoya en Irlande un inspecteur des ponts et chaussées, M. Mallet, avec mission d’y étudier les appareils de MM. Clegg et Samuda.

M. Mallet fit connaître, dans divers rapports, toutes les conditions du chemin de fer atmosphérique de Kingstown. Il entra dans des développements étendus sur les frais de son établissement, et compara, sous ce double rapport, les deux systèmes rivaux. Cet ingénieur, à qui l’on a reproché d’avoir vu d’un œil trop indulgent le système irlandais, s’attacha à combattre les objections qu’il soulevait, et finalement, demanda que l’on en fît parmi nous, un essai sur une étendue suffisante.

Adoptant les vues de M. Mallet, le gouvernement décida que le système atmosphérique serait soumis à l’épreuve définitive de l’exécution pratique. Un projet de loi fut donc présenté aux chambres, demandant pour cet objet, une allocation de 1 800 000 francs.

La loi fut votée le 5 août 1844. Une ordonnance du 2 novembre de la même année, arrêta que l’expérience aurait lieu entre Nanterre et le plateau de Saint-Germain.

À cette époque, le chemin de fer de Paris à Saint-Germain s’arrêtait à la commune du Pecq, au pied de la colline. On vit, dans le choix de cet emplacement, un moyen décisif de juger le nouveau système dans les conditions où il peut offrir le plus d’avantages, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit de faire remonter aux convois des pentes d’une inclinaison considérable. La ville de Saint-Germain y trouvait, d’ailleurs, l’avantage de faire arriver jusqu’à elle les convois qui s’arrêtaient forcément au bas du plateau. Elle ajouta donc une somme de 200 000 francs aux 1 800 000 francs alloués par l’État.

Le chemin de fer atmosphérique, qui devait être établi de Nanterre au plateau de Saint-Germain, sur une longueur de plus de huit kilomètres, n’a été en réalité, exécuté que dans l’intervalle de deux kilomètres et demi qui sépare Saint-Germain du pont de Montesson, dans le bois du Vésinet. Il fut terminé en 1847.

Tout le monde connaît les travaux d’art si remarquables que nos ingénieurs ont exécutés pour franchir la différence de 50 mètres de niveau, qui existe entre l’embarcadère et le pont de Montesson. Vus de la terrasse de Saint-Germain, ils présentent un aspect plein de hardiesse et d’élégance. Ces travaux consistent en un pont de dix arches jeté sur