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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/683

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d’un courant dans le circuit métallique. Si l’on chauffe la soudure opposée, le courant change de direction et l’aiguille se dévie en sens contraire. Le même dérangement se produit si, au lieu de chauffer la première soudure, on la refroidit.

Œrsted a proposé de donner le nom de courants thermo-électriques à ces courants produits par la chaleur, et d’appeler courant hydro-électrique, celui de la pile ordinaire, à un ou plusieurs liquides. La première de ces dénominations a été adoptée.

On ne tarda pas à constater que tous les métaux, et même beaucoup d’autres corps, donnent naissance à des courants thermo-électriques plus ou moins intenses, lorsqu’on les réunit en circuits fermés que l’on chauffe en un point convenable. On obtient même des courants de cette espèce dans un circuit fermé avec une seule substance, lorsque celle-ci présente des défauts d’homogénéité qui modifient la propagation régulière de la chaleur. M. Becquerel, qui, un des premiers, a étudié et analysé les phénomènes thermo-électriques dans les circuits métalliques simples ou composés, a exécuté l’expérience suivante. On fait un nœud dans un fil de platine qui constitue un circuit fermé ; on chauffe à droite ou à gauche de ce nœud, et l’on voit se produire aussitôt un courant allant de la partie chaude à la partie froide. Les effets sont encore les mêmes en coupant le fil en deux, superposant les deux bouts l’un sur l’autre et chauffant d’un côté ou de l’autre.

De ces phénomènes M. Becquerel a conclu que, lorsque la chaleur se propage dans une barre de métal, il s’opère une suite de décompositions et de recompositions du fluide neutre, qui accompagnent la propagation de la chaleur ; celle-ci rencontre-t-elle un obstacle, il y a aussitôt séparation des deux électricités au point où cet obstacle existe.

La cause électro-motrice la plus efficace est une solution de continuité, telle, par exemple, qu’une soudure de deux métaux différents. Le sens du courant dépend des métaux employés. Ainsi, dans un circuit de bismuth et de cuivre, le courant marche en sens contraire de celui qu’on obtient dans un circuit d’antimoine et de cuivre. Dans la liste suivante, chaque métal reçoit près de la soudure chaude, le fluide positif avec ceux qui le suivent, et le fluide négatif avec ceux qui le précèdent : Antimoine, Fer, Zinc, Argent, Or, Cuivre, Étain, Plomb, Platine, Bismuth. L’antimoine et le bismuth occupent, comme on le voit, les deux extrémités de l’échelle ; leur association produit des courants relativement énergiques.

Les expériences de M. Becquerel ont montré, en outre, que l’intensité des courants thermo-électriques est proportionnelle à la température des soudures, jusqu’à 50 ou 100 degrés.

L’effet est d’ailleurs le même, que les métaux soient soudés bout à bout et en contact immédiat, ou bien séparés par un conducteur.

La connaissance de ces curieux effets a permis de construire des piles thermo-électriques, dont le pouvoir électro-moteur est dû uniquement à la chaleur. Fourier et Œrsted sont les premiers qui aient eu l’idée, en 1823, de composer des piles avec des barreaux de métaux différents. Ils formèrent d’abord un circuit polygonal, au moyen de trois barreaux de bismuth alternant avec trois barreaux d’antimoine, qu’ils disposèrent horizontalement. Ayant chauffé une ou plusieurs soudures, mais jamais deux soudures consécutives, ils reconnurent que le courant offrait une intensité d’autant plus grande qu’il y avait un plus grand nombre de soudures chauffées.

La figure 349 représente la disposition de la pile thermo-électrique imaginée par M. Pouillet. Chaque couple est formé d’une lame de cuivre C, et d’un barreau de bismuth B, en forme de fer à cheval. Les deux soudures plongent dans des vases V, qui sont remplis alternativement, l’un d’eau chaude et l’autre de glace pilée.