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est donc facilement devancé par le télégraphe électrique. Un navire qui s’apprête à partir de New-York pour la Nouvelle-Orléans, peut apprendre par ce moyen, vingt heures à l’avance, qu’une tempête règne dans le golfe du Mexique.

Sur les chemins de fer, le télégraphe électrique est d’une utilité immense. Les services qu’il rend dans ce cas particulier, sont beaucoup plus étendus qu’on ne l’imagine. Pour la facilité du service, pour la sécurité de la voie, le télégraphe électrique est une annexe devenue aujourd’hui tout à fait indispensable, des voies ferrées. C’est grâce à l’échange continuel de signaux expédiés d’une station à l’autre, que d’innombrables trains peuvent circuler sur une même ligne, et que l’on peut, dans la même journée, faire circuler et se croiser sur le pont d’Asnières, par exemple, jusqu’à deux cents convois. Si donc le télégraphe électrique a reçu des chemins de fer un appui précieux à l’origine, en lui ouvrant une voie directe et bien surveillée, en revanche, la télégraphie électrique a payé au centuple les services qu’elle avait reçus de ces mêmes chemins de fer, d’eux à l’époque de ses débuts.

Les journaux se plaisent à raconter des faits particuliers qui viennent, par intervalles, prouver d’une manière frappante tous les avantages du télégraphe électrique dans les rapports privés des citoyens.

En 1848, un convoi de chemin de fer avait apporté à Norwich la nouvelle de la chute du pont suspendu de Yarmouth. Qu’on juge de l’inquiétude et de l’effroi des habitants : ils avaient presque tous leurs enfants en pension à Yarmouth ! Ils coururent en foule à la station du chemin de fer, demandant à grands cris des nouvelles de leurs enfants : « Tous les enfants sont sauvés ! » dit le télégraphe électrique.

Au mois d’octobre 1846, un déserteur du vaisseau américain la Pensylvanie, en rade à Norfolk, emporta au comptable du navire une somme de 3 000 francs, et prit, avec le produit de ce vol, le chemin de fer de Baltimore. Le fait reconnu, le comptable se rendit en toute hâte à la station télégraphique de Washington, et fit transmettre à Baltimore le signalement du coupable, avec ordre de l’arrêter. Dix minutes après, la police de Baltimore tenait entre ses mains l’ordre d’arrestation, et au bout d’une demi-heure arrivait à Washington la dépêche suivante : « Le déserteur est arrêté, il est en prison ; que faut-il en faire ? »

On a vu plusieurs fois, en Amérique et en Angleterre, deux amateurs d’échecs, placés à cinquante lieues de distance, faire leur partie par le télégraphe, aussi facilement que s’ils étaient en face l’un de l’autre.

Un mariage fut célébré en 1846, par l’intermédiaire du télégraphe électrique, entre deux personnes dont l’une habitait Boston et l’autre Baltimore, et qui trouvèrent commode d’arranger, sans se déplacer, cette petite affaire. Mais la validité d’un tel mariage devint, à bon droit, la cause d’un procès.

Pendant la célébration d’une messe de mariage dans une paroisse d’Angleterre, l’une des demoiselles d’honneur de la mariée s’esquiva de l’église, et disparut avec l’un de ses admirateurs. Le télégraphe électrique fut aussitôt mis en réquisition sur toutes les lignes de chemins de fer, pour donner l’ordre d’arrêter les fugitifs, fortement soupçonnés d’aller invoquer l’assistance du forgeron de Gretna-Green. Le télégraphe ne fonctionna que trop bien, car, en même temps que les coupables étaient rejoints, quatre couples de jeunes époux, très-légitimement unis dans la matinée, se trouvaient arrêtés sur d’autres points de la même ligne, et voyaient leurs excursions matrimoniales désagréablement suspendues par l’intervention de la police.

Le télégraphe électrique a été mis quelquefois au service de la médecine. Le malade et le médecin étaient installés chacun à l’une