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hauteur moyenne, dont deux portent des voiles carrées.

La capacité de ce navire est de 22 500 tonneaux. Il peut recevoir 4 000 personnes à son bord.

Le Great-Eastern porte, suspendue à ses flancs, toute une petite flotte, destinée à sauver, en cas de malheur, son équipage et ses passagers. Ce sont d’abord deux steamers à hélice, suspendus derrière les roues du navire. Chacun de ces steamers, de la capacité de 70 tonneaux, a 30 mètres de long, 5 mètres de large, et porte une machine de la force de 40 chevaux. Puis viennent 20 bateaux plus petits, la plupart pontés, munis de leurs mâts et de leurs voiles.

Les mâts sont tous en fer creux, excepté le dernier, à cause de la proximité de la boussole. Ils ont une hauteur de 40 à 52 mètres, un diamètre de 1 mètre sur le pont et un poids de 30 à 40 tonnes, sans compter les vergues. Chaque mât repose dans une colonne carrée de plaques de fer, qui monte de la quille jusqu’au pont supérieur, et qui est rivée et encastrée dans tous les ponts qu’elle traverse. Pour le cas où il deviendrait nécessaire de couper les mâts, il se trouve à la base de chacun, à un mètre environ au-dessus du pont supérieur, un appareil propre à comprimer, moyennant une vis puissante, les deux faces du mât, de façon à le couper et à le faire tomber sur le côté. Toutes les vergues principales des mâts, gréées carrément, sont également composées de plaques de fer. La vergue principale a 40 mètres de longueur, ou à peu près 12 mètres de plus que la vergue principale des plus grands vaisseaux de guerre, à peu près quatre fois l’épaisseur de la plus grande vergue qui ait jamais été construite, et elle pèse plusieurs tonnes de moins que si elle était en bois.

Les roues font dix révolutions par minute : les dimensions et la rapidité d’évolution des roues expliquent la vitesse de la marche de ce navire. Au mois d’avril 1867, on essaya de consacrer le Great-Eastern à des voyages transatlantiques, pour transporter de New-York à Brest les voyageurs américains, à l’occasion de l’exposition universelle de Paris ; le Great-Eastern ne fit qu’un seul voyage, mais sa traversée ne dura que huit jours.

La manœuvre de ce colossal navire aurait exigé un très nombreux personnel, si la vapeur ne donnait aujourd’hui le moyen de remplacer presque partout le travail des hommes par un moteur inanimé. Le Great-Eastern a des machines à vapeur particulières, de la force de 30 chevaux, pour manœuvrer les cabestans, faire jouer les ponts, lever les ancres, etc., dix autres appareils de ce genre, chacun de la force de 10 chevaux, pour alimenter les chaudières.

Personne n’ignore que le Great-Eastern fut la dernière œuvre, et on peut le dire, le chef-d’œuvre de Brunel. L’exécution de ce colosse maritime faisait honneur à la fois, à Brunel et à la nation britannique. Il est juste de rappeler à ce propos, que ce sont deux bâtiments anglais, le Sirius et le Great-Western, qui osèrent les premiers, en 1838, tenter, au moyen de la puissance de la vapeur, la traversée de l’océan Atlantique, entre la Grande-Bretagne et New-York. Ce fut encore une compagnie anglaise qui, en 1843, fit, avec le Great-Britain, qui avait 98 mètres de longueur, le premier essai d’un steamer à coque entièrement de fer[1].

Tel était le navire auquel on allait confier la charge immense du câble transatlantique. Nous le verrons bientôt se comporter admirablement avec une mer des plus mauvaises, et ne pas paraître embarrassé sous cet incroyable fardeau.

Le comité scientifique de la Compagnie du télégraphe atlantique, était composé de MM. Wheatstone, Varley, Thomson, physiciens bien connus, auxquels on avait adjoint M. Withworth, constructeur et ingénieur de grand mérite, auteur de divers perfection-

  1. Voir le premier volume de cet ouvrage, pages 220 et 223.