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si bien calculée que la toile qui composait la montgolfière n’avait été ni brûlée ni endommagée dans aucune de ses parties.

Cette ascension de voyageurs avait été précédée, en Italie, par quelques expériences aérostatiques. C’est ainsi que le 11 décembre 1783, on avait lancé, à Turin, un petit ballon, fabriqué avec de la baudruche.

En France, la fièvre aérostatique ne s’était pas calmée. Le 13 janvier 1784, une société d’amateurs, sous la direction de l’abbé Mably, lançait un aérostat de 6 mètres de diamètre, du château de Pisançon, près Romans, dans le Dauphiné ; et le même jour, à Grenoble, M. de Barin en lançait un autre, devant toute la population de la ville.

Le 16 janvier 1784, le comte d’Albon faisait partir, de sa maison de campagne de Franconville, aux environs de Paris, un aérostat à gaz hydrogène, de 5 mètres de diamètre, formé de soie gommée. On avait suspendu au-dessous, une cage d’osier contenant deux cochons d’Inde et un lapin, avec quelques provisions de voyage.

L’aérostat s’éleva en peu d’instants à une hauteur telle qu’on le perdit entièrement de vue. On le trouva cinq jours après, à six lieues de son point de départ. Les animaux étaient en parfait état de santé.

Le marquis de Bullion, à Paris, lança, le 3 février 1784, de son hôtel, qui devint célèbre, plus tard, sous le nom d’Hôtel des ventes, une montgolfière de papier, de 5 mètres de diamètre, qui avait, pour tout appareil destiné à la raréfaction de l’air, une large éponge imbibée d’un litre d’esprit de vin, et placée dans une assiette de fer-blanc. Ce ballon resta en l’air un quart d’heure, et ce temps lui suffit pour franchir une distance de neuf lieues : il tomba dans une vigne, près de Basville.

Une simple éponge imbibée d’huile, de graisse et d’esprit de vin, fut aussi tout l’appareil qui servit à faire partir, le 15 février 1784, une montgolfière à Mâcon. Elle était en papier, et l’auteur de cette machine, Cellard du Chastelais, s’était amusé à y suspendre un chat, enfermé dans une cage. En une demi-heure, la montgolfière n’était plus visible dans le ciel. Elle tomba, au bout de deux heures, à sept ou huit lieues de Mâcon. Le chat fut la malheureuse victime de cette expérience : il avait été sans doute asphyxié par le manque d’air dans les hautes régions.

Le 22 février 1784, on lança d’Angleterre, un aérostat à gaz hydrogène, qui traversa la Manche : c’était un petit ballon, d’un mètre et demi de diamètre seulement. Il partit de Sandwich, dans le comté de Kent. Poussé par un vent du nord-ouest, il traversa rapidement la mer, et fut trouvé dans la campagne, à environ trois lieues de Lille. À ce ballon était attachée une lettre, où l’on priait de faire connaître à William Boys, à Sandwich, le lieu et le moment où il aurait été trouvé.

Trois jours auparavant, on avait lancé à Oxford, du Collége de la reine, un aérostat tout semblable.

Argand, de Genève, l’inventeur de la lampe à double courant d’air, dont nous aurons à parler dans la notice sur l’éclairage, rendait, à la même époque, le roi, la reine et la famille royale d’Angleterre, témoins d’une expérience aérostatique, en lançant à Windsor un aérostat à gaz hydrogène, d’un mètre seulement de diamètre.

On voit qu’à cette époque, toute l’Europe était passionnée pour ce genre de spectacle. Depuis les princes jusqu’aux simples particuliers, chacun avait la tête tournée vers les cieux, sans que la piété y fût pour rien. Il ne se passait pas de jour, il ne se passait pas de soirée, où l’on ne vît une montgolfière s’élever dans les airs. Peu de personnes tentaient la périlleuse aventure d’une ascension, mais partout on se donnait le plaisir de lancer d’inoffensives montgolfières ou des aérostats à gaz hydrogène.

Le caprice de la mode ne manqua pas de s’emparer de cet attrait nouveau. En 1784