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portâmes à l’électromètre : elle se trouva résineuse. Nous répétâmes deux fois cette observation dans le même moment : la première, en détruisant l’électricité atmosphérique par l’influence de l’électricité vitrée de l’électrophore ; la seconde, en détruisant l’électricité vitrée tirée de l’électrophore, au moyen de l’électricité atmosphérique. C’est ainsi que nous pûmes nous assurer que cette dernière était résineuse.

« Cette expérience indique une électricité croissante avec les hauteurs, résultat conforme à ce que l’on avait conclu par la théorie, d’après les expériences de Volta et de Saussure. Mais maintenant que nous connaissons la bonté de notre appareil, nous espérons vérifier de nouveau ce fait par un plus grand nombre d’essais dans un autre voyage.

« Nos observations du thermomètre nous ont indiqué au contraire une température décroissant de bas en haut, ce qui est conforme aux résultats connus. Mais la différence a été beaucoup plus faible que nous ne l’aurions attendu ; car, en nous élevant à 2 000 toises, c’est-à-dire bien au-dessus de la limite inférieure des neiges éternelles à cette latitude, nous n’avons pas éprouvé une température plus basse que 10°,5 au thermomètre centigrade (8°,4 Réaumur) ; et, au même instant, la température de l’Observatoire, à Paris, était de 17°,5 centigrades (14° Réaumur).

« Un autre fait assez remarquable, qui nous est aussi donné par nos observations, c’est que l’hygromètre a constamment marché vers la sécheresse, à mesure que nous nous sommes élevés dans l’atmosphère, et, en descendant, il est graduellement revenu vers l’humidité. Lorsque nous partîmes, il marquait 80°,8 à la température de 16°,5 du thermomètre centigrade ; et à 4 000 mètres de hauteur, quoique la température ne fût qu’à 10°,5, il ne marquait plus que 30°. L’air était donc beaucoup plus sec dans ces hautes régions qu’il ne l’est près de la surface de la terre.

« Pour nous élever à ces hauteurs, nous avions jeté presque tout notre lest : il nous en restait à peine quatre ou cinq livres. Nous avions donc atteint la hauteur à laquelle l’aérostat pouvait nous porter tous deux à la fois. Cependant, comme nous désirions vivement terminer tout à fait l’observation de la boussole, M. Gay-Lussac me proposa de s’élever seul à la hauteur de 6 000 mètres (3 000 toises), afin de vérifier nos premiers résultats ; nous devions déposer tous les instruments en arrivant à terre, et n’emporter dans la nacelle que le baromètre et la boussole. Lorsque nous eûmes pris ce parti, nous nous laissâmes descendre, en perdant aussi peu de gaz qu’il nous était possible. Nous observâmes le baromètre en entrant dans les nuages. Il nous donna 1 223 mètres (600 toises) pour leur élévation. Nous avons déjà remarqué qu’ils paraissaient tous de niveau, en sorte que cette observation indique pour cet instant leur hauteur commune. Lorsque nous arrivâmes à terre, il ne se trouva personne pour nous retenir, et nous fûmes obligés de perdre tout notre gaz pour nous arrêter. Si nous eussions pu prévoir ce contre-temps, nous ne nous serions pas pressés de descendre sitôt. Nous nous trouvâmes vers une heure et demie dans le département du Loiret, près du village de Mériville, à dix-huit lieues environ de Paris.

« Nous n’avons point abandonné le projet de nous élever à 6 000 mètres et même plus haut, s’il est possible, afin de pousser jusque-là nos expériences sur la boussole. Nous allons préparer promptement cette expédition, qui se fera dans peu de jours, puisque l’aérostat n’est nullement endommagé. M. Gay-Lussac s’élèvera d’abord ; ensuite, s’il le croit lui-même nécessaire, je m’élèverai seul à mon tour pour vérifier ses observations. Lorsque nous aurons ainsi terminé ce qui concerne la boussole, nous désirons entreprendre de nouveau plusieurs voyages ensemble, pour faire, s’il est possible, des recherches exactes sur la qualité et la nature de l’électricité de l’air à diverses hauteurs, sur les variations de l’hygromètre, et sur la diminution de la chaleur en s’éloignant de la terre ; objets qui paraissent devoir être utiles dans la théorie des réfractions.

« Nous ne désespérons pas non plus de pouvoir observer des angles pour déterminer trigonométriquement notre position dans l’espace ; ce qui donnerait des notions précises sur la marche du baromètre, à mesure qu’on s’élève. Le mouvement de l’aérostat est si doux, que l’on peut y faire les observations les plus délicates ; et l’expérience de notre premier voyage, ainsi que l’usage de nos appareils, nous permettra de recueillir en peu de temps un grand nombre de faits. Tels sont les désirs que nous formons aujourd’hui, si nous sommes assez heureux pour que les recherches que nous venons de faire paraissent à la classe de quelque utilité. »

Le voyage aérostatique exécuté par MM. Biot et Gay-Lussac, avait laissé beaucoup de points à éclaircir ; il fallait confirmer les premières observations, et les vérifier en s’élevant à une plus grande hauteur. Pour atteindre ce dernier but, avec l’aérostat qui avait servi aux premières expériences, un seul observateur devait s’élever. Il fut décidé que Gay-Lussac exécuterait cette nouvelle ascension.

Dans ce second voyage, Gay-Lussac confirma et étendit les résultats qu’il avait obtenus avec Biot, relativement à la permanence de l’action magnétique du globe. Il prit un assez grand nombre d’observations thermo-