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métriques, et essaya de déterminer, à leur aide, la loi de décroissance de température dans les hautes régions de l’air. L’observation de l’hygromètre n’amena à aucune conclusion satisfaisante.

Parvenu à la hauteur de 6 500 mètres, Gay-Lussac recueillit de l’air dans ces régions extrêmes, qu’aucun homme n’avait encore atteintes, avant lui ! Il s’était muni d’un grand ballon de verre, fermé par un robinet de cuivre fixé sur une garniture du même métal, et tenant bien le vide. Il avait fait le vide dans le ballon au moyen de la machine pneumatique, et l’avait emporté dans sa nacelle. En l’ouvrant à la hauteur maximum où il était parvenu, il remplit ce vase de l’air de ces régions.

L’analyse chimique de cet air faite le lendemain, prouva qu’il avait la même composition que l’air pris à la surface de la terre.

C’était là un résultat d’une importance fondamentale à cette époque. En effet, bien des personnes admettaient alors la présence du gaz hydrogène dans les hautes régions de l’air. Les observations de Biot et Gay-Lussac dissipèrent cette erreur. On savait par les expériences de Berthollet et d’Humphry Davy, que l’air, sous toutes les latitudes, et pris à une faible hauteur au-dessus de la mer, présente partout la même composition. De Saussure, dans sa célèbre ascension au mont Blanc, avait rapporté de l’air atmosphérique, qu’il avait analysé, et qui s’était montré parfaitement identique, dans sa composition, avec l’air de la plaine. Mais le mont Blanc n’a que 4 810 mètres. Il importait donc d’analyser de l’air recueilli dans une région plus élevée encore. Un aérostat donnait seul le moyen de pénétrer dans ces régions extrêmes. Tel fut précisément le résultat scientifique auquel conduisit l’ascension aérostatique de Gay-Lussac. L’air recueilli par Gay-Lussac à 6 500 mètres de hauteur, fut analysé par lui avec le plus grand soin, dans son laboratoire de l’École polytechnique, par le procédé eudiométrique dont on lui doit l’invention, et cet air présenta une composition parfaitement la même que celle de l’air pris à la surface du sol, à Paris, Ce résultat fut ainsi désormais acquis à la physique du globe.

Nous donnerons ici un court extrait de la relation faite par Gay-Lussac de la célèbre ascension du 16 septembre 1804.

« Tous nos instruments étant prêts, dit Gay-Lussac, le jour de mon départ fut fixé au 29 fructidor. Je m’élevai, ce jour-là en effet, du Conservatoire des Arts et Métiers, à 9 heures et 40 minutes, le baromètre étant à 76°,525, l’hygromètre à 57°,5 et le thermomètre à 27°,75. M. Bouvard, qui fait tous les jours des observations météorologiques à Paris, avait jugé le ciel très-vaporeux, mais sans nuages. À peine me fus-je élevé de 1 000 mètres, que je vis, en effet, une légère vapeur répandue dans toute l’atmosphère au-dessous de moi, et qui me laissait voir confusément les objets éloignés.

« Parvenu à la hauteur de 3 032 mètres, je commençai à faire osciller l’aiguille horizontale, et j’obtins, cette fois, vingt oscillations en 83s tandis qu’à terre et d’ailleurs dans les mêmes circonstances, il lui fallait 84s,43 pour en faire le même nombre. Quoique mon ballon fût affecté du mouvement de rotation que nous avions déjà reconnu dans notre première expérience, la rapidité du mouvement de notre aiguille me permit de compter jusqu’à vingt, trente et même quarante oscillations.

« À la hauteur de 3 863 mètres, j’ai trouvé que l’inclinaison de mon aiguille, en prenant le milieu de l’amplitude de ses oscillations, était sensiblement de 31″ comme à terre. Il m’a fallu beaucoup de temps et de patience pour faire cette observation, parce que, quoique emporté par la masse de l’atmosphère, je sentais un petit vent qui dérangeait continuellement la boussole, et, après plusieurs tentatives infructueuses, j’ai été obligé de renoncer à l’observer de nouveau. Je crois, néanmoins, que l’observation que je viens de présenter mérite quelque confiance.

« Quelque temps après, j’ai voulu observer l’aiguille de déclinaison ; mais voici ce qui était arrivé. La sécheresse, favorisée par l’action du soleil dans un air raréfié, était telle que la boussole s’était tourmentée au point de faire plier le cercle métallique sur lequel étaient tracées les divisions, et de se courber elle-même. Les mouvements de l’aiguille ne pouvaient plus se faire avec la même liberté, mais indépendamment de ce contre-temps, j’ai remarqué qu’il était très-difficile d’observer la déclinaison de l’aiguille avec cet appareil. Il arrivait, en effet, que lorsque j’avais placé la boussole de manière à faire coïncider avec une ligne fixe l’ombre du fil horizon-