Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/544

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tal qui servait de style, le mouvement que j’avais donné à la boussole en avait aussi imprimé un à l’aiguille, et lorsque celle-ci était à peu près revenue en repos, l’ombre du style ne coïncidait plus avec la ligne fixe. Il fallait encore mettre la boussole dans une position horizontale ; et pendant le temps qu’exigeait cette opération, tout se dérangeait de nouveau. Sans vouloir persister à faire des observations auxquelles je ne pouvais accorder aucune confiance, j’y ai renoncé entièrement ; et libre de tout autre soin, j’ai donné toute mon attention aux oscillations de l’aiguille horizontale. Je me suis pourtant convaincu, en reconnaissant les défauts de notre boussole, qu’il est impossible d’en employer une autre plus convenable, qui déterminerait la déclinaison avec assez de précision. Je fais remarquer que, pour tenter cette expérience, j’avais descendu isolément les autres aiguilles dans des sacs de toile, à 15 mètres au-dessous de la nacelle.

« Pour qu’on puisse voir facilement l’ensemble de tous les résultats que j’ai obtenus, je les ai réunis dans le tableau qui est à la fin de ce mémoire ; et ils y sont tels qu’ils se sont présentés à moi, avec les indications correspondantes du baromètre, du thermomètre et de l’hygromètre. Les hauteurs ont été calculées d’après la formule de M. Laplace, par M. Gouilly, ingénieur des ponts et chaussées, qui a bien voulu prendre cette peine ; le baromètre n’ayant pas varié sensiblement le jour de mon ascension depuis 10 heures jusqu’à 3, on a pris, pour calculer les diverses élévations auxquelles j’ai fait des observations, la hauteur du baromètre, 76,508, qui a eu lieu à terre à 3 heures, hauteur qui, conformément aux observations faites par M. Bouvard à l’Observatoire, est plus grande de 0m,43 que celle qui avait été observée au moment du départ. Les hauteurs du baromètre dans l’atmosphère ont été ramenées à celles qu’aurait indiquées un baromètre à niveau constant placé dans les mêmes circonstances, et l’on a pris pour chaque hauteur la moyenne entre les observations des deux baromètres. La température à terre ayant également peu varié entre 10 et 3 heures, on l’a supposée constante et égale à 30°,75 du thermomètre centigrade.

« En fixant maintenant les yeux sur le tableau, on voit d’abord que la température suit une loi irrégulière relativement aux hauteurs correspondantes ; ce qui provient, sans doute, de ce qu’ayant fait des observations tantôt en montant, tantôt en descendant, le thermomètre aura suivi trop lentement ces variations. Mais si l’on ne considère que les degrés du thermomètre qui forment entre eux une série continue décroissante, on trouve une loi plus régulière. Ainsi la température à terre étant de 27°,75, et à la hauteur de 3 691 mètres de 8°,5, si l’on divise la différence des hauteurs par celle des températures, on obtient d’abord 191m,7 (98 toises) d’élévation pour chaque degré d’abaissement de température. En faisant la même opération pour la température 5°,25, et 0°,5 ainsi que pour celles 0°,6 et 9°,5, on trouve, dans l’un et dans l’autre cas, 141m,6 (72tois.,6) d’élévation pour chaque degré d’abaissement de température : ce qui semble indiquer que vers la surface de la terre la chaleur suit une loi moins décroissante que dans le haut de l’atmosphère, et qu’ensuite, à de plus grandes hauteurs, elle suit une progression arithmétique décroissante. Si l’on suppose que depuis la surface de la terre, où le thermomètre était à 30°,75, jusqu’à la hauteur de 6 977 mètres (3 580 toises) où il était descendu à – 9°,5, la chaleur a diminué comme les hauteurs ont augmenté, à chaque degré d’abaissement de température correspondra une élévation de 173m,3 (88tois.,9).

« L’hygromètre a eu une marche assez singulière. À la surface de la terre il n’était qu’à 57°,5, tandis qu’à la hauteur de 3 032 mètres, il marquait 62° ; de ce point, il a été continuellement en descendant, jusqu’à la hauteur de 5 267 mètres où il n’indiquait plus que 27°,5, et de là à la hauteur de 6 884 mètres il est remonté graduellement à 34°,5. Si l’on voulait, d’après ces résultats, déterminer la loi de la quantité d’eau dissoute dans l’air à diverses élévations, il est clair qu’il faudrait faire attention à la température ; en y joignant cette considération, on verrait qu’elle suit une progression extrêmement décroissante.

« Si l’on considère maintenant les oscillations magnétiques, on remarque que le temps pour dix oscillations faites à diverses hauteurs est tantôt au-dessus, tantôt au-dessous de celui de 42s,16 qu’elles exigent à terre. En prenant une moyenne entre toutes les oscillations faites dans l’atmosphère, dix oscillations exigeraient 42s,20, quantité qui diffère bien peu de la précédente ; mais en ne considérant que les dernières observations qui ont été faites aux plus grandes hauteurs, le temps pour dix oscillations serait un peu au-dessous de 42s,16, ce qui indiquerait, au contraire, que la force magnétique a un peu augmenté. Sans vouloir tirer aucune conséquence de ce léger accroissement apparent, qui peut très-bien tenir aux erreurs qu’on peut commettre dans ce genre d’expériences, je dois conclure que l’ensemble des résultats que je viens de présenter confirme et étend le fait que nous avions observé, M. Biot et moi, et qui prouve que, de même que la gravitation universelle, la force magnétique n’éprouve point de variations sensibles aux plus grandes hauteurs où nous puissions parvenir.

« La conséquence que nous avons tirée de nos expériences pourra paraître un peu trop précipitée à ceux qui se rappelleront que nous n’avons pu faire des expériences sur l’inclinaison de l’aiguille aimantée. Mais si l’on remarque que la force qui fait osciller une aiguille horizontale est nécessairement dépendante de l’intensité et de la direction de la force magnétique elle-même, et qu’elle est repré-