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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/606

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prises de nos jours et ayant pour but d’étudier la constitution physique de l’atmosphère. Ce n’est toutefois qu’après un bien long intervalle, que les physiciens se sont engagés dans la carrière tracée par Biot et Gay-Lussac. Depuis l’ascension aérostatique exécutée par ces deux savants, quarante ans s’écoulèrent sans amener aucune ascension exécutée dans l’intérêt de l’étude physique de l’atmosphère. Ce n’est qu’en 1850 que MM. Barral et Bixio donnèrent le signal de la reprise de ces expériences utiles.

MM. Barral et Bixio, l’un, ancien élève de l’École polytechnique, l’autre, médecin, homme politique et directeur d’une librairie agricole, conçurent le projet de s’élever en ballon à une grande hauteur, pour étudier, avec les instruments perfectionnés que nous possédons, plusieurs phénomènes météorologiques encore imparfaitement observés. Les appareils et les instruments nécessaires à cette expédition aérienne, avaient été construits par M. Regnault ; Dupuis-Delcourt avait fourni le ballon qui devait emporter les expérimentateurs dans les régions de l’air.

L’ascension eut lieu devant la cour de l’Observatoire, le 29 juin 1850, à 10 heures et demie du matin. Le ballon était rempli d’hydrogène pur, préparé au moyen de la réaction de l’acide chlorhydrique sur le fer. Tous les instruments, baromètres, thermomètres, hygromètres, ballons destinés à recueillir de l’air, etc., étaient rangés, suspendus à un cercle, au-dessus de la nacelle où se placèrent les voyageurs.

Cependant, au moment de partir, on reconnut que plusieurs dispositions de l’appareil aérostatique étaient loin d’être convenables, et faisaient craindre pour l’expédition un dénoûment fâcheux. Le ballon de Dupuis-Delcourt était vieux et d’une étoffe usée, le filet trop étroit ; les cordes qui supportaient la nacelle étaient trop courtes : aussi, au lieu de rester suspendue, comme à l’ordinaire, à quelques mètres au-dessous de l’aérostat, la nacelle se trouvait-elle presque en contact avec lui. Enfin, une pluie torrentielle vint à tomber ; sous l’action des rafales, l’étoffe du ballon se déchira en plusieurs points, et l’on fut obligé de la raccommoder, à grand’peine et en toute hâte. Les conditions étaient donc de tout point défavorables, et la prudence commandait de différer le départ. Mais les voyageurs ne voulurent rien entendre ; l’ordre fut donné de lâcher les cordes, et le ballon, dont la force ascensionnelle n’avait pas même été mesurée, s’élança avec la rapidité d’une flèche. On le suivit d’un œil inquiet, jusqu’au moment où on le vit disparaître dans un nuage.

Ensevelis dans un brouillard obscur et épais, MM. Barral et Bixio restèrent près d’un quart d’heure avant de revoir le jour. Sortant enfin de ce nuage, ils s’élancèrent vers le ciel, et n’eurent au-dessus de leurs têtes qu’une voûte bleue étincelante de lumière. Ils commencèrent alors leurs observations. La colonne du baromètre ne présentait que 45 centimètres, ce qui indiquait une élévation de 4 242 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le thermomètre, qui à terre marquait 20 degrés, était tombé à 7 degrés.

Pendant qu’ils se livraient à ces premières observations, le baromètre continuait de baisser, et la vitesse d’ascension ne faisait que s’accroître. En effet, le ballon avait quitté la terre, gorgé d’humidité ; en arrivant dans la région supérieure aux nuages, dans un espace sec, raréfié, directement exposé aux rayons solaires, il se délestait spontanément par l’évaporation de l’humidité, et sa force ascensionnelle allait toujours croissant. Cependant les voyageurs, tout entiers au soin de leurs expériences, songeaient à peine à donner un regard à la machine qui les emportait, et ne s’apercevaient aucunement de l’allure dangereuse qu’elle commençait à prendre. La chaleur du soleil, agissant sur le gaz, le dilatait considérablement, et comme nos aé-