Aller au contenu

Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/663

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

trop étendu, pour que les physiologistes ne s’empressassent point de rechercher la nature et les causes de tant d’étonnants effets. Ces phénomènes étaient à peine signalés, que Gerdy les étudiait sur lui-même, et arrivait ainsi à de curieuses observations. L’analyse que ce physiologiste nous a donnée de ses impressions pendant l’état éthérique est un chapitre intéressant de l’histoire encore à peine ébauchée des effets psychologiques de l’éther. M. Serres essayait en même temps de fournir l’explication du fait général de l’insensibilité, et M. Flourens, examinant les altérations que présentent, sous l’empire de cet état, la moelle épinière et la moelle allongée, entrait avec bonheur dans une voie qui promet aux physiologistes un abondant tribut d’utiles observations. M. Longet publiait, de son côté, son remarquable mémoire relatif à l’action des vapeurs éthérées sur les systèmes nerveux cérébro-spinal et ganglionnaire, travail auquel rien de sérieux n’a été encore ajouté. Venant en aide aux recherches des physiologistes, les chimistes essayèrent ensuite, mais avec un succès très-contestable, d’expliquer la nature des altérations subies, sous l’influence anesthésique, par le sang et les gaz qui concourent à la respiration. M. Paul Dubois et M. Simpson, d’Édimbourg, appelaient bientôt après l’attention du public médical sur les applications des inhalations éthérées à l’art des accouchements ; enfin MM. Honoré Chailly et Stoltz, de Strasbourg, confirmaient, par des observations tirées de leur pratique obstétricale, toute l’utilité et toute l’importance de cette application de la méthode nouvelle.

Peu de temps après s’élevait une autre question aussi riche d’avenir, car elle allait conduire à la découverte d’un nouvel agent d’une puissance anesthésique supérieure encore à celle de l’éther. Les propriétés stupéfiantes de l’éther sulfurique étaient à peine connues, que l’idée vint de rechercher si elles ne se retrouveraient pas dans quelques autres substances. On pensa tout de suite à examiner à ce point de vue les éthers autres que l’éther sulfurique ; la classe des éthers embrasse en effet de très-nombreuses espèces, et il était naturel de rechercher si la propriété anesthésique se retrouverait dans les différents composés qui forment ce groupe.

Le 20 février 1847, M. Sédillot, de Strasbourg, rendit compte à l’Académie de médecine de Paris, des résultats que lui avait fournis l’inhalation de l’éther chlorhydrique, composé auquel il avait reconnu des propriétés anesthésiques. Le 22, M. Flourens communiquait à l’Académie des sciences de Paris les expériences qu’il avait exécutées avec le même éther, et il indiquait comme produisant l’anesthésie les éthers acétique et oxalique. Le 1er mars 1847, et sans avoir connaissance des faits précédents, je signalais à l’Académie des sciences et lettres de Montpellier le résultat que j’avais obtenu en essayant sur les animaux l’action de l’éther acétique. Les vapeurs de cet éther avaient amené une insensibilité tout aussi complète que celle que produit l’éther sulfurique, mais dans un intervalle de temps un peu plus long. M. Bouisson confirmait peu après, en l’employant chez l’homme, l’action stupéfiante du même composé. M. le docteur Chambert étendit beaucoup les observations faites jusqu’à cette époque sur les différents éthers, et les généralisa avec une grande sagacité. Il a été reconnu, à la suite de ces divers travaux, que les vapeurs d’un assez grand nombre de liquides jouissent de la propriété d’abolir la douleur.

La précieuse découverte de l’action anesthésique du chloroforme fut réalisée à la même époque.

Le chloroforme est un composé chimique qui résulte de la réaction des chlorures d’oxydes sur l’alcool et qui se rapproche des éthers par sa composition. On l’obtient en distillant un mélange d’alcool et de chlorure