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de chaux. Le chloroforme a été découvert en 1830 par Soubeiran.

Fig. 346. — Flourens.

Le 8 mars 1847, M. Flourens communiqua à l’Académie des sciences de Paris, une note touchant l’action de l’éther sur les centres nerveux, dans laquelle on lit ce passage :

« L’éther chlorhydrique m’a conduit à essayer le corps nouveau connu sous le nom de chloroforme. Sous l’influence de cet agent, au bout de quelques minutes et de très-peu de minutes (de six dans une première expérience, de quatre dans une seconde et dans une troisième) l’animal a été tout à fait éthérisé[1]. »

Mais dans ce mémoire, dont le but était purement physiologique, M. Flourens parlait du chloroforme, en même temps que d’autres composés anesthésiques, et il ne l’avait cité que comme instrument des phénomènes qu’il voulait produire, pour étudier le mode d’action des agents anesthésiques sur les centres nerveux : il n’avait d’ailleurs opéré que sur des animaux. Aussi l’attention des chirurgiens ne s’était nullement portée sur le chloroforme, et le public médical ressentit une vive surprise lorsqu’un praticien d’Édimbourg, M. Simpson, annonça le 10 novembre 1837, les résultats extraordinaires qu’il avait retirés de l’emploi chirurgical du chloroforme.

Quelle que fût, en effet, l’action stupéfiante de l’éther, elle était encore dépassée par le chloroforme, et il était évident, d’après les faits annoncés par M. Simpson, que l’éther allait être détrôné. Il ne fallait plus, avec ce nouvel agent, prolonger pendant huit à dix minutes l’inhalation des vapeurs ; au bout d’une minute d’inspiration, le malade tombait frappé de l’insensibilité la plus profonde. Aucun appareil inhalateur, aucun, instrument particulier n’était plus nécessaire ; quelques grammes de chloroforme versés sur un mouchoir placé devant la bouche suffisaient pour produire l’effet désiré. L’inspiration de l’éther provoque presque toujours une irritation pénible de la gorge, qui amène une toux opiniâtre, et inspire aux malades une répugnance souvent invincible ; au contraire, le chloroforme, doué d’une suave odeur, est respiré avec délices. Tous ces faits étaient présentés par M. Simpson avec une clarté et une abondance de preuves de nature à entraîner tous les esprits. En effet, l’auteur ne s’était pas trop pressé de publier ses résultats, il avait procédé avec la prudence et la réserve qui préparent les succès durables. Il avait d’abord essayé le chloroforme dans des opérations légères, telles qu’extractions de dents, ouverture d’abcès, galvano-puncture. Plus tard, il le mit en usage dans des opérations plus graves, dans celles qui appartiennent à la grande chirurgie ; il l’avait appliqué aussi aux accouchements et à quelques cas de médecine. Le chirurgien d’Édimbourg ne se décida à faire connaître sa découverte que lorsqu’il eut réuni près de cinquante observations propres à établir son efficacité. Il insistait particulièrement sur la supériorité

  1. Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. XXIV, p. 342.