Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/75

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les notes de l’accord sol, ut, sol, dont la perception est facile, même pour les personnes qui n’ont aucune notion de musique.

Au lieu de clairons, on peut faire usage du tambour, en substituant à chacune des notes sol, ut, sol, une batterie particulière, dont la signification est connue à l’avance. Le canon même peut être utilisé dans les circonstances où les clairons et les tambours n’ont pas une portée suffisante, par exemple en mer, ou par un grand vent. Ces divers modes de transmission ne changent rien au système téléphonique : chaque signal reste toujours composé de notes dont le nombre ne dépasse pas trois, et dont chacune a sa représentation dans le mode particulier de transmission que l’on croit devoir accepter.

Dans cette télégraphie, comme autrefois dans la télégraphie aérienne, sauf les signaux du service, les stationnaires intermédiaires n’ont aucune connaissance de la valeur des sons qu’ils transmettent. D’ailleurs, la faculté de changer à volonté la clef des signes, garantit le secret des dépêches.

Pour étendre encore les applications de son système, et rendre la communication possible entre deux corps d’armée, dans toute espèce de circonstances, Sudre a imaginé, comme conséquence des mêmes principes, un mode particulier de télégraphie aérienne qui n’exige que trois signes distincts. Pendant le jour, trois disques coloriés, pendant la nuit, trois fanaux lui suffisent pour établir une correspondance entre deux postes éloignés. On peut même indiquer simultanément le même ordre à toute une armée, par l’emploi de trois fusées de couleurs différentes. On a cet avantage, quand on emploie les disques ou les fanaux, que l’on peut se passer de signal d’avertissement ; il suffit, en effet, d’échelonner trois disques déterminés à des hauteurs différentes, sur un support léger, que l’on élève ensuite assez haut pour qu’ils soient aperçus. La disposition géométrique des disques, jointe à la différence de leurs teintes, suffit pour indiquer d’un seul coup un ordre quelconque inscrit au dictionnaire télégraphique.

Tous ces moyens rentrent, on le voit, dans les pratiques de la télégraphie aérienne, dont nous venons d’exposer l’histoire et les règles principales.

Les trois disques coloriés ne sont que la représentation visuelle des trois sons ; ils occupent la même place qu’eux sur une portée de trois lignes ; si bien qu’un soldat-clairon qui les voit, peut les signaler à un poste qui ne pourrait les apercevoir.

Depuis l’époque, déjà éloignée, où elle fut imaginée par l’inventeur, la téléphonie a été l’objet, un grand nombre de fois, d’un examen approfondi. Il ne sera pas sans intérêt de faire connaître les différentes opinions que les hommes de science ou de guerre ont exprimées sur sa valeur.

En 1829, à la suite du rapport qui avait été adressé à l’Institut sur la demande de Berton, le ministre de la guerre fit procéder, avons-nous dit, à des expériences sur ce nouveau mode de correspondance militaire. Dans un premier essai que M. Sudre fit au Champ-de-Mars, en présence de plusieurs généraux de l’état-major et du génie, une phrase expédiée à l’aide du clairon, de l’extrémité du Champ-de-Mars à une vedette placée au-dessus de la butte du Trocadéro, fut reçue par celle-ci, et le signal de réception renvoyé à l’expéditeur, en moins de 15 secondes (fig. 27, page 73).

À la suite de ce premier résultat, le ministre de la guerre nomma une commission d’officiers généraux de toutes armes, laquelle, après plusieurs expériences du même genre, qui eurent lieu au Champ-de-Mars, fit un rapport favorable sur la nouvelle invention.

Quelques mois plus tard, l’inventeur recevait du ministre de la marine l’ordre de se rendre à Toulon, pour y faire des expériences devant une commission maritime présidée par le contre-amiral Gallois. Elles se renouvelèrent plusieurs fois, et toujours avec succès, devant cette commission. Le rapport se mon-