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M. V. Desroche ressuscite ainsi le genre charmant, et presque oublié, de la miniature. Ses portraits ont toute la douceur des miniatures anciennes, avec le cachet et la certitude de ressemblance que leur assure la photographie. La mode se prononce de plus en plus en faveur de cette nouvelle et intéressante application des arts photographiques.

Un autre artiste peintre et photographe, M. Félix Lochard, exécute sur émail des portraits photographiques, mais il s’adonne plus spécialement à la fabrication des émaux photographiques pour la bijouterie, branche du commerce parisien qui tend à prendre une grande extension.

Une des nouveautés qui ont été les plus remarquées à l’Exposition de 1867, comme application de la photographie, c’est la vitrification, transparente ou opaque, des épreuves photographiques. Dans l’élégant pavillon où MM. Tessié du Motay et Maréchal avaient réuni leurs diverses inventions, la foule se pressait, pour admirer de magnifiques vitraux obtenus, non par les anciens procédés de l’art du verrier, mais par de véritables méthodes photographiques.

La méthode au moyen de laquelle messieurs Maréchal et Tessié du Motay produisent des images photographiques, transparentes ou opaques, sur le verre, l’émail, la lave, la porcelaine ou la faïence, consiste en principe à faire usage de caoutchouc et de collodion, pour former des surfaces que l’on rend impressionnables à la lumière par de l’iodure d’argent. Après avoir fait apparaître l’image latente, avoir développé et fixé cette image par des lavages dans des bains contenant des cyanures alcalins et des iodocyanures, on arrive à produire des vitraux de teintes pures et éclatantes.

La méthode de M. Tessié du Motay s’applique à la décoration de toutes les matières siliceuses, et d’une façon spéciale, sur le cristal et sur le verre ; car on obtient sur ces deux substances des images vitrifiées, visibles soit par réflexion, soit par transparence.

À côté des vitraux de M. Tessié du Motay, se voyaient, à l’Exposition universelle, des produits du même genre, exécutés par M. Moisson. Le procédé qui permet de les obtenir a été décrit par l’inventeur dans le Bulletin de la Société française de photographie[1].

Il est une autre catégorie de vitraux photographiques qui produit les plus doux effets, grâce au jeu de la lumière, et que nous ne pouvons manquer de signaler. Il ne s’agit pas ici de photographies vitrifiées proprement dites, c’est-à-dire obtenues par l’action du feu. Ce n’est autre chose qu’une épreuve positive obtenue sur verre, par le procédé à l’albumine, épreuve que l’on interpose entre la lumière et l’œil, à la manière des vitraux.

Assurément, la durée, la résistance au frottement, ne sont point assurées par ce système, et sous ce rapport, ce genre de produits est infiniment au-dessous des émaux photographiques. Mais leur charme et leur douceur sont infinis, et la blancheur mate de la lumière qui traverse la substance du verre donne de ravissantes sensations. Il faut dire aussi que l’habileté spéciale de l’artiste est peut-être pour beaucoup dans ce séduisant résultat. Les vitraux sur albumine que l’on remarquait le plus à l’Exposition, sortaient des mains de M. Soulier. Or, nous ne connaissons pas aujourd’hui, dans ce que l’on peut appeler les œuvres générales de la photographie, d’artiste supérieur à M. Soulier, à qui l’on doit de véritables chefs-d’œuvre en fait de monuments et de vues.

Les mêmes remarques peuvent s’appliquer à M. Ferrier, qui présentait également des vitraux sur albumine. M. Ferrier, ce photographe cosmopolite qui a fait défiler devant son objectif toutes les parties du monde, et qui a toujours cherché et souvent atteint la perfection, s’est appliqué, comme M. Soulier, à produire des vitraux sur albumine, et nous n’avons pas besoin de dire qu’il y a réussi.

  1. Avril 1865.