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Lorsque les planches métalliques recouvertes de la couche sensible, ont été exposées, pendant un temps suffisant, à une température de 50 degrés, on les soumet à l’action de la lumière, sous un cliché négatif. Le temps de pose varie avec l’état du jour et de la saison. Le temps de production des images par la lumière est le même que pour les images au chlorure d’argent.

Quand les plaques ont été impressionnées, elles sont soumises d’abord à un lavage prolongé, puis desséchées à l’air libre ou à l’étuve. Ainsi préparées, elles sont aptes à recevoir l’impression aux encres grasses, soit par le tampon, soit par le rouleau.

Dans cet état, la planche destinée à recevoir l’impression ressemble, dit M. Tessié du Motay, à un moule à surface ondulée ; on dirait une planche gravée à l’aqua-tinta, mais sans grains comme dans ces sortes de planches. Pour remplacer le grain absent, c’est l’eau contenue dans les pores de la couche non insolée qui éloigne les corps gras des blancs restés à nu ; tandis que les parties devenues insolubles, c’est-à-dire les creux de la planche, retiennent les encres grasses. Ces planches participent donc tout à la fois des propriétés de la gravure et de la lithographie, et elles se trouvent produites par la synthèse des deux phénomènes, l’un physique, l’autre chimique, « dont l’invention est due, dit M. Tessié du Motay, rendant une justice éclatante à deux de ses devanciers, au double génie de Senefelder et de M. Poitevin. »

Les planches ainsi préparées peuvent, en moyenne, fournir un tirage de soixante-quinze épreuves. Passé ce nombre, les reliefs s’affaissent, les épreuves tirées sur papier deviennent moins vigoureuses et moins parfaites.

Cette limitation du tirage à un si petit nombre d’exemplaires, serait le côté défectueux de la nouvelle méthode d’impression, si, d’une part, le prix d’une couche peu épaisse, composée de colle de poisson, de gélatine, de gomme et de quelques milligrammes de sels de chrôme, n’était fort minime ; si, d’autre part, on ne suppléait sans peine à ce faible tirage par la possibilité, au moyen d’un clichage très-rapide, de multiplier indéfiniment les planches destinées à l’impression.

Voici comment on opère le clichage.

On étend sur verre, sur papier ou sur tout autre support, une couche de collodion additionnée de tannin. On impressionne par superposition sur un cliché négatif ou positif. Cette impression est instantanée à la lumière solaire, elle peut durer de une à quelques secondes à la lumière artificielle. L’image est ensuite relevée, développée et fixée au moyen des agents révélateurs et fixateurs aujourd’hui connus et employés en photographie. On prend une feuille et on la fait adhérer avec soin au collodion, sur lequel l’image du cliché est reproduite. La gélatine se colle au collodion et devient assez adhésive pour qu’on puisse enlever au verre ou au papier ce collodion, qui fait corps avec la gélatine desséchée.

Le cliché sur gélatine, ainsi produit, sert à son tour d’image positive ou négative pour reproduire de nouveaux clichés sans l’intermédiaire du verre ou de tout autre objectif transparent. Par cette méthode, on peut obtenir en un jour, soit à la lumière naturelle, soit à la lumière artificielle, plusieurs centaines de clichés, qui peuvent servir à la multiplication indéfinie des planches photographiques.

Le procédé de M. Tessié du Motay n’est pas entré dans la pratique, comme celui de MM. Baldus et Garnier. L’extrême complication et la longueur de ce procédé, l’expliquent suffisamment.

Nous venons de signaler, en parlant des travaux de MM. Poitevin, Nègre, Baldus, Drivet, Garnier et Tessié du Motay, les méthodes les plus récentes de gravure héliographique, celles qui sont appelées à introduire