Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 3.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’a, le premier, adopté parmi nous. On se sert, d’après son conseil, de bandelettes trempées dans le collodion, ce qui donne plus de solidité à l’appareil. Aujourd’hui l’emploi de la dissolution éthérée du fulmi-coton est devenu habituel dans nos hôpitaux.

Ainsi, comme la lance d’Achille, le fulmi-coton peut guérir les blessures qu’il a causées. Si donc il fallait un jour définitivement renoncer à consacrer le coton-poudre à l’usage des armes à feu, sa découverte ne serait pas encore restée absolument stérile, puisqu’elle aurait au moins servi à étendre les ressources de l’art chirurgical. Destiné dans l’origine à devenir un instrument de destruction, ce singulier produit aurait plus pacifiquement terminé sa carrière, en prenant place parmi les salutaires moyens de la chirurgie moderne. Et trop heureuse l’humanité, si tant d’inventions meurtrières, créées pour semer autour de nous le deuil et les funérailles, se trouvaient, par quelque revirement subit, transformées un jour en autant de baumes bienfaisants, propres à panser nos blessures et à calmer nos douleurs !



CHAPITRE XII

les nouvelles poudres de guerre. — les poudres blanches, ou poudres allemandes, à base de chlorate de potasse. — la poudre à canon prussienne, ou cellulose nitrée, — la poudre au carbazotate de potasse ; son utilité. — composition et préparation de la poudre au carbazotate de potasse ; son emploi pour l’explosion des torpilles sous-marines. — la nitro-glycérine ; ses effets explosifs. — emploi de la nitro-glycérine pour le sautage des mines. — le feu fénian.

Depuis la découverte du fulmi-coton, toute une révolution s’est accomplie dans l’artillerie en général, et en particulier dans l’armement de la marine. Des canons d’un calibre énorme, des projectiles d’une disposition toute nouvelle, le chargement s’opérant par la culasse, la rayure de l’âme des bouches à feu et des fusils, toutes ces transformations ont changé la face de la balistique moderne. La poudre à canon ordinaire, la poudre noire à base de salpêtre, avait été adoptée et calculée pour les bouches à feu et les armes portatives telles qu’on les construit depuis deux siècles. Elle ne pouvait se plier aux dispositions toutes nouvelles qui se sont introduites récemment dans le système général de nos armes à feu. Après avoir perfectionné les armes, il a donc fallu songer à perfectionner l’agent moteur destiné à agir sur le projectile.

Il serait peut-être exact de dire que chaque espèce de bouche à feu, telle qu’on la construit aujourd’hui, et chaque espèce d’arme portative, exigerait une poudre particulière, pour se plier à sa structure. Mais sans aller jusqu’à cette proposition extrême, on peut dire que dans l’état actuel des choses, il est devenu indispensable de posséder, pour les besoins nouveaux de l’artillerie, quatre poudres très-distinctes, que l’on peut classer ainsi : 1o une poudre à mousquet ; 2o une poudre à canon à explosion lente, pour les bouches à feu à âme longue, en usage dans l’artillerie de campagne ou de terre ; 3o une poudre à canon à explosion vive, pour les bouches à feu à âme courte, destinées à l’armement des vaisseaux de guerre ; 4o enfin une poudre brisante, pour enflammer les torpilles sous-marines et pour faire partir les fourneaux de mine.

On s’est flatté, pendant quelque temps, de parvenir à plier l’ancienne poudre à ces besoins divers ; on a cru pouvoir augmenter sa puissance, en modifiant les proportions relatives de nitre, de soufre et de charbon, qui sont ses éléments constitutifs. Mais ces variantes introduites dans la composition d’un mélange, qui depuis trois siècles a été tourné et retourné de cent façons, n’ont rien produit d’utile. En perfectionnant les moyens de trituration, en substituant les meules aux pilons, comme agent de trituration, et rendant ainsi plus intime le mélange du soufre, du