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Fig. 390. — Le vaisseau à vapeur le Napoléon franchit les Dardanelles le 15 octobre 1854, remorquant la Ville de Paris, devant les escadres anglaise et française, arrêtées par les gros temps.


motrice étant cachée dans un canal intérieur, la manœuvre du bâtiment ne peut être empêchée par l’ennemi.

« La plus grosse batterie à vapeur des Américains est, dit-on, plus grande qu’une frégate ; elle est mise en mouvement par une machine à feu de la force de 100 chevaux : elle a un parapet en bois de quatre pieds et demi d’épaisseur et elle est armée de quarante-quatre grosses pièces d’artillerie.

« Cette espèce de forteresse flottante peut avoir de grands avantages pour défendre l’entrée d’un port, d’un détroit, d’une rivière ou d’une rade, pour appuyer une ligne d’embossage, et porter une masse défensive sur le front, les flancs ou les derrières d’une disposition navale quelconque à proximité de la côte.

« Quant aux combats en haute mer, les batteries des Américains ne sauraient y convenir : la manœuvre en est lente, et leur lourde structure ne permet pas de les exposer aux effets de la tempête : enfin la grande puissance nécessaire à la machine à feu, qui va jusques à la force de 100 chevaux, exigerait une telle quantité de charbon pour un voyage longtemps prolongé, que le bâtiment le contiendrait à peine.

« On a de plus remarqué, que la machine à feu produit une telle chaleur, qu’au bout de quelques minutes la batterie est inhabitable ; et l’on n’a trouvé, dit-on, de remède à cet inconvénient qu’en plaçant un navire portant la machine à feu, entre deux navires portant les batteries, ce qui complique encore la construction.

« Outre cela, l’épaisseur du bois de ces grosses batteries fait tomber dans cette alternative : que si les sabords sont étroits à l’extérieur, chaque pièce ne peut tirer que devant elle, et que si au contraire les sabords sont assez évasés pour laisser découvrir et battre une suffisante étendue, ils forment alors des entonnoirs qui conduisent dans le bâtiment tous les coups de l’ennemi, lors même que ces coups sont mal dirigés.

« Il arrive de là qu’une batterie américaine serait battue avec peu de difficulté, au moyen de quelques légers navires armés écartés les uns des autres, qui, si les embrasures sont étroites, se placeraient hors de leur champ de tir, et qui, si elles sont larges, en feraient des égouts à boulets par où l’on aurait bientôt démonté les pièces, et mis hors de combat les canonniers. Il y aurait d’ailleurs un péril mortel et certain à faire courir à ces masses de bois, en les